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seulement sur la probité et la piété des candidats, mais « sur leurs dispositions aux emplois que donne la Compagnie et sur leur docilité d’esprit. » En outre, le « supérieur, » pendant les trois mois de sa charge, n’avait pas le droit de faire recevoir plus de deux personnes. Les accessions nouvelles ne s’élevaient donc, ce semble, qu’au chiffre de huit par an.

Du reste, on n’encourage guère les membres à attirer des adhérens. « Ne point parler de la Compagnie, — leur enjoint-on par-dessus tout ; — ni de ses œuvres, ni de sa conduite, ni des particuliers qui la composent ; ne la point faire connaître en quelque manière, ni par quelque moyen que ce soit. » Sur cette discrétion, les statuts de Poitiers précisent encore : « Ne nommer en aucune manière la Compagnie, ni à ses amis qui n’en sont pas, ni ceux qui sont mariés à leurs épouses, enfin pas même à ceux qu’on estimerait d’une piété et d’une intégrité de mœurs assez grandes pour mériter qu’on leur propose de s’y engager. » Tout ce qui est loisible, en fait de propagande, c’est de laisser vaguement entendre que l’ « on connaît des personnes, sans en nommer aucune, qui s’assemblent pour travailler à quelques bonnes œuvres, avec lesquelles, si ces personnes se trouvent d’inclination de vouloir se joindre, on leur pourra offrir de leur en procurer la connaissance… »

Puis, de ces membres recrutés et triés avec tant de circonspection, l’initiation est parcimonieusement limitée. C’est oralement, soit par les exhortations individuelles des « anciens » chargés de l’instruction des « nouveaux, » soit par les homélies entendues aux séances, que les néophytes apprennent à connaître « l’esprit » de la Compagnie. Dans celle de Paris, les statuts (encore que, rédigés avec une sobre prudence, ils ne continssent que des principes généraux, sans rien de bien compromettant) n’étaient communiqués qu’en copies, et avec de rigoureuses restrictions qui devaient rendre cette communication aussi rare et aussi peu dangereuse que possible. « Ceux à qui ils le seront, disent les règlemens de Poitiers comme ceux de Paris, s’en chargeront sur l’inventaire qui sera entre les mains du secrétaire, les rendront au plus tôt, et n’en donneront ni retiendront copie. »

Le reste du temps, rien de plus étroitement gardé que les archives.

« Chaque Compagnie aura un coffret pour mettre ses