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aucune proposition définie et se tient aux généralités. Il croit à la fédération impériale, non qu’il s’en dissimule les difficultés, mais des obstacles plus grands ont été surmontés, selon lui, lors de la formation des Etats-Unis d’Amérique ou de la confédération des provinces canadiennes. En tout cas, « l’établissement d’une union plus étroite est un idéal qui doit toujours nous tenir au cœur, et nous ne devons rien faire, maintenant ni plus tard, qui en rende la réalisation impossible. » Le ministre concède, un peu à regret, qu’il ne faut point trop se presser, qu’une union purement volontaire a aussi ses mérites, comme le prouve l’appui matériel et moral donné par les colonies dans la guerre sud-africaine, que ce serait une fatale erreur de transformer cet enthousiasme spontané en une obligation quelconque, qui pourrait être assumée de mauvais gré ou acceptée seulement pour la forme. Aussi toute proposition tendant à resserrer et à mieux définir l’union, doit venir des colonies, non de la métropole. « Mais, si cette proposition est faite, elle sera accueillie avec enthousiasme en Angleterre. » Le mot de M. Laurier : « Si vous voulez notre aide, appelez-nous dans vos conseils, » fournit à M. Chamberlain l’occasion d’un mouvement pathétique. Oui, s’écrie-t-il, nous voulons votre aide, nous en avons besoin : « Le Titan fatigué chancelle sous le poids de sa destinée. » Il faut que ses enfans viennent le soutenir, le décharger un peu, et il sera trop heureux de prendre leurs avis. Divers projets ont été proposés en ce sens : représentation des colonies dans les deux Chambres ou l’une seulement, institution d’un Conseil fédéral. Le ministre les rappelle et se prononce pour ce dernier. « Si l’on désirait procéder graduellement, ce qui est probable, car nous sommes tous habitués à la lenteur avec laquelle s’est élaborée notre constitution, ce conseil pourrait être d’abord purement consultatif. » Peu à peu on lui donnerait des pouvoirs exécutifs et législatifs. Mais M. Chamberlain sent qu’il se laisse emporter trop haut : revenant à terre, il déclare qu’en l’état actuel, ce qui se rapproche le plus du Conseil fédéral rêvé, ce sont les conférences entre premiers ministres coloniaux, et il se félicite que le gouvernement de la Nouvelle-Zélande ait déposé une proposition tendant à leur donner une périodicité régulière.

S’étant ainsi imposé sur les questions politiques une réserve peu conforme à ses habitudes, le ministre des Colonies se montre plus pressant en ce qui concerne la défense impériale. Il signale