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nationale de l’Église allemande, » et, en 1813, il faisait de lui son coadjuteur.

Le travail de Wessenberg à Vienne exposait Rome à de graves périls. Ce n’est pas que l’ancien vicaire général de Constance groupât autour de lui une nombreuse école théologique ; car la plupart des ecclésiastiques imbus des idées fébroniennes inclinaient vers une combinaison qui, dans l’étroite enceinte de chaque Etat, asservirait l’Eglise au maître du sol ; et, si l’on excepte une brochure de Kopp, intitulée : « Idées pour l’organisation de l’Église allemande, contribution au futur Concordat, le « patriarcalisme » de Wessenberg ne ralliait qu’un médiocre nombre d’hommes d’Eglise. Mais Wessenberg avait derrière lui Dalberg, qui, déchu de son grand-duché, aspirait du moins à garder sa primatie et à l’étendre désormais sur l’Allemagne tout entière ; et quant au chancelier de Metternich, qui souhaitait un accord d’ensemble entre le Saint-Siège et le Corps germanique, — désormais restauré sous l’égide de l’Autriche, — il ne répudiait pas l’espoir d’obtenir de Wessenberg, désireux, lui aussi, d’unifier l’Église allemande, un concours précieux. Quelque temps durant, le plus révolutionnaire des théologiens allait posséder la confiance du moins révolutionnaire des hommes d’État, et, pour Wessenberg, cette confiance était une force.

Restaurer dans ses droits originaires et imprescriptibles la communauté chrétienne : tel était le but suprême de Wessenberg. Une Église nationale allemande, dépendante d’un primat, régie par des statuts qui seraient partie intégrante de la constitution germanique, tenue sans cesse en haleine par des synodes diocésains, provinciaux et nationaux, et protégée contre le Pape par cette triple barrière du synode, de la primatie, et de la loi fédérale, serait l’organe approprié pour la réforme du catholicisme universel. Il n’y avait pas de temps à perdre ; car Pie VII, en rétablissant les Jésuites parmi le silence universel des cours, commettait un coup d’audace qu’il convenait de relever. On n’avait qu’à conclure avec Rome un concordat collectif, très sommaire ; puis, cette politesse une fois faite, à se passer d’elle. Vouloir négocier, pour chaque Etat, des concordats distincts, c’était permettre à Rome de diviser pour régner. Au contraire, avec un primat qui, de sa propre autorité, donnerait ou rendrait aux évêques les pouvoirs canoniques refusés ou retirés par le Pape, l’Église d’Allemagne serait assez virile, assez fière, assez