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avons été attaqués, nous répondons à cette attaque de manière à en prévenir à jamais le retour, voilà tout. L’occasion est bonne pour faire sentir le poids de nos armes aux pillards de Figuig ; elle n’est bonne qu’à cela. Le gouvernement parait l’avoir senti. M. le président du Conseil, interrogé à la Chambre des députés, a tenu un langage très sage, auquel il faut seulement lui demander de rester fidèle. Au surplus, ce langage avait été tenu, dès le premier moment, par M. le gouverneur général de l’Algérie. Nous ne commettrons pas l’imprudence de poser la question du Maroc à propos d’un incident auquel le hasard de la présence de M. Jonnart a donné plus d’importance qu’il n’aurait dû en avoir, mais qui, ramené à ses véritables proportions, montre seulement que les autorités chérifiennes sont impuissantes à faire la police sur la frontière, et que nous devons y pourvoir nous-mêmes. Le traité de 1845 nous en donne le droit, par le droit de suite ; notre supériorité militaire nous en donne le moyen. Le danger ne commencerait pour nous que si nous nous laissions entraîner à une expédition véritable, dont le moindre défaut serait d’être inutile et le moindre inconvénient de nous coûter très cher.


L’Italie vient de traverser une crise d’irrédentisme qui a éclaté subitement, et n’est peut-être pas encore tout à fait terminée. Elle n’en est pas loin toutefois. Le gouvernement devait prendre, et a pris effectivement des mesures pour en empêcher le développement. Si peu qu’elle ait duré, elle a suffi à jeter des lumières dans les profondeurs de l’opinion italienne. Ce mot est peut-être excessif. Nous ne savons pas au juste si l’irrédentisme est aujourd’hui chez nos voisins un sentiment vraiment profond ; mais il est à coup sûr très vif. On aurait tort de croire que le feu soit éteint ; il est seulement assoupi.

Malgré la révolution prodigieuse qui s’y est faite depuis moins de cinquante ans et qui a créé son unité, l’Italie ne regarde pas ses destinées comme accomplies. Tout le monde sait que certaines provinces autrichiennes sont considérées par elle comme lui appartenant. Ce sont : le Tyrol, que la géographie semble lui attribuer en effet, et Trieste où la majorité de la population est italienne. C’est donc à la fois au nom de la géographie et au nom de la race que l’Italie forme à l’endroit de ces parties du territoire autrichien comme une revendication secrète, mais qui se réveille à l’occasion, comme le fait l’a montré. L’occasion est venue d’incidens qui se sont produits à l’Université d’Innsbrück. Les populations italiennes de l’Autriche demandent depuis longtemps, mais depuis quelque temps avec une énergie plus