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verrons ce procédé se renouveler souvent pendant la campagne. Dans une lettre, datée de Mayence le 5 août[1], le général de Moltke écrit au général de Steinmetz, commandant la Ire armée :

« Je suis parfaitement d’accord avec Votre Excellence au sujet de l’importance qu’il y a pour les commandans d’armée à connaître et à posséder exactement les motifs servant de base aux ordres de Sa Majesté… »

Le soir du même jour, le général de Steinmetz se plaint au Roi de l’insuffisance des instructions du général de Moltke ; il termine son télégramme en disant : « Il me manque toute base pour pouvoir agir à propos. »

Dès le début des opérations, il y avait de l’aigreur dans les relations de Steinmetz et de Moltke. Le général de Steinmetz a soixante-quatorze ans ; il s’était couvert de gloire en 1866, et avait été surnommé « le lion de Nachod. » Il apporte dans ses fonctions de commandant en chef, vis-à-vis du général de Moltke, une susceptibilité dont nous verrons d’autres exemples, et qu’on ne trouve jamais chez les princes commandant les autres armées. Cela tient, sans doute, au caractère irritable du vieux Steinmetz ; mais peut-être aussi à ce que les autres commandans d’armée sont, par leur situation même de princes, tellement au-dessus de ces rivalités mesquines, que ni l’intervention directe dans leurs troupes du grand état-major et de son chef, ni les correspondances latérales de chef d’état-major à chef d’état-major, ne peuvent leur porter ombrage.

Le grand état-major n’intervient ni dans le combat du 2 août à Wissembourg, ni dans les batailles livrées le 6 août à Reichshoffen contre Mac-Mahon et à Spickeren contre Frossard.

Le 7 août, nouvelle lettre personnelle du général de Moltke à Blumenthal, chef d’état-major de la IIIe armée, pour le féliciter au sujet de la victoire du 6 août et pour l’orienter sur la suite des opérations. Sont orientés de même, mais par ordre de Sa Majesté, les commandans des Ire et IIe armées.

Le 8 août, télégramme[2] aux trois commandans d’armée, destiné à augmenter l’autorité et les facilités de service du général de Moltke :

« Sa Majesté a prescrit que toutes les demandes d’ordre militaire, comptes rendus etc., qui lui seraient envoyés par

  1. Correspondance militaire du maréchal de Moltke, Ier vol., p. 247.
  2. Ibid., Ier vol., p. 261.