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En retour, la Bavière n’eut à payer que 64 millions, et elle ne perdit que les districts de Gersfeld et d’Orb et l’enclave de Caulsdorf (22 août). Bismarck raconta à Benedetti que l’intervention du gouvernement de l’Empereur n’avait pas été étrangère au succès de la mission de Pfordten, et le ministre bavarois témoigna également sa gratitude à notre ambassadeur. L’ironie était vraiment féroce. Le roi Louis écrivit au roi de Prusse : « Après que la paix a été conclue entre nous et qu’une amitié ferme et durable est fondée entre nos Etats, j’éprouve le vif désir de donner à cette amitié une expression symbolique extérieure : j’offre pour cela à Votre Majesté royale de posséder en commun avec moi le glorieux burg de ses aïeux à Nuremberg ; si les bannières unies de Hohenzollern et de Wittelsbach flottent aux créneaux de ce burg, on devra voir là un symbole que la Prusse et la Bavière veillent de conserve aux destinées de l’Allemagne, que, par l’intermédiaire de Votre Majesté, la Providence conduit dans des voies nouvelles (30 août). » La réconciliation était complète, sinon entre les peuples, du moins entre les souverains : « Il y a toujours quelque chose de dangereux en politique à se faire payer, » a dit Bismarck[1].

Les préliminaires de Nikolsburg n’avaient pas constitué l’unité allemande, et il était vrai de dire qu’ils avaient coupé l’Allemagne en trois tronçons. Après les traités militaires, cela cessa d’être vrai ; même alors, cependant, il n’exista pas une unité à la latine, telle que Victor-Emmanuel la faisait en Italie. On n’intronisa pas un seul prince régnant souverainement sur toute la contrée, jouissant d’un droit de gouvernement intérieur. Mais l’unité militaire, la seule qui nous menaçât, était accomplie militairement, il n’y avait plus de Mein, et cette prépotence prussienne sur les choses de la guerre, qu’on eût mis des années à obtenir, fut, grâce à nous, consommée en quelques heures. Ce fut encore un effet de la politique des compensations.


XIII

La conclusion du traité de Prague fut rapide. Quoique l’Empereur n’y fût point partie, il intervint dans la négociation et obtint quelques modifications et additions sans importance réelle.

  1. Discours du 5 décembre 1876.