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cessaires ? M. Combes commence par tout exterminer ; c’est sa manière. Peut-être est-il incapable d’en appliquer une autre. Peut-être estime-t-il, avec Machiavel, qu’il faut faire d’un seul coup tout le mal qu’on se propose de faire, et même un peu plus, afin de pouvoir ensuite se montrer clément. Mais qui ne se délierait de la clémence de M. Combes ? Et est-il bien permis de citer ici Machiavel ?

Quant à la défense adressée aux évêques d’autoriser un ancien congréganiste à prêcher, elle est certainement excessive. Si les sermons prononcés dans une église sont violens ou injurieux, en un mot s’ils contiennent un délit, il y a des lois qui permettent d’en poursuivre les auteurs ; mais de quel droit interdire d’avance à un prêtre de prêcher, si son évêque le lui permet ? Nous disons un prêtre, puisqu’il n’y a plus de congréganistes. A l’exception de quatre, toutes les congrégations d’hommes ont été dispersées. Qu’a-t-on exigé de leurs anciens membres ? Qu’ils se missent sous la juridiction de leur évêque. Eh bien ! ils l’ont fait. Ils se sont pliés à toutes les prescriptions, non seulement de la loi, mais des décrets, des arrêtés, des circulaires : que leur demande-t-on de plus ? Ils sont sécularisés : que leur veut-on encore ? Bientôt, sans doute, M. Combes leur interdira de dire la messe, et peut-être faut-il lui savoir gré que, du moins jusqu’ici, il se borne à leur interdire la prédication ; mais nous serions bien aise de savoir en vertu de quel droit il substitue, sur ce point particulier, sa propre juridiction à celle des évêques. Un homme qui a été congréganiste, mais qui ne l’est plus, se retrouve placé dans le droit commun : en vertu de quelle autorité M. Combes l’en fait-il sortir ? Personne ne l’aurait deviné, s’il ne l’avait pas dit. Lorsqu’une congrégation qui a été dissoute en France continue d’exister à l’étranger, il estime que, bon gré mal gré, tout homme qui en a fait partie continue de lui appartenir. C’est en vain qu’il aura été relevé de ses vœux spéciaux ; en vain qu’il aura été sécularisé conformément à toutes les règles ; en vain qu’il aura été replacé sous la juridiction de l’ordinaire : il suffira que son ancienne congrégation existe en dehors de nos frontières pour qu’il y reste affilié, ou qu’il en soit légitimement suspect. Sans doute il est regrettable que M. Combes ne gouverne pas le reste du monde comme la France, et qu’il n’ait pas le moyen de supprimer les congrégations ailleurs comme chez nous ; mais qu’y faire ? Les choses sont ainsi ; personne n’y peut rien. M. Combes se venge du moins de son impuissance au dehors en exerçant au dedans des représailles sur les membres sécularisés des congrégations qui ont l’audace de subsister à Rome, alors qu’il les a condamnées et exécutées ici. Tant que