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province de Constantine. Rien n’a été fait pour parer à ces éventualités, et il pourra être trop tard d’y penser au commencement d’une guerre. La nature tourmentée du pays et la proximité d’Alger et d’Oran où devront forcément se trouver concentrés des effectifs importans, rend invraisemblable toute tentative sérieuse d’invasion entre Bougie et la frontière marocaine. Dans cette portion de la colonie, il suffit de se borner à assurer le bon fonctionnement des voies ferrées et la protection des points importans du littoral tels que Sidi-Ferruch, Arzew, Oran, Mers-el-Kébir et Rachgoun. Il est peu probable, en raison de l’état à peu près continuel de troubles dans lequel se trouve le Maroc, et de l’absence de toutes voies de communication, qu’un ennemi européen tente d’y débarquer dans le voisinage de notre frontière pour tourner nos défenses du littoral et pénétrer dans l’intérieur de la colonie. Mais, dans cette hypothèse, nous pourrions renforcer notre position défensive par l’achèvement entre Aïn-Temouchent et Tlemcen de la voie ferrée qui doit réunir cette dernière place à Oran.

Indépendamment de l’organisation des réserves, les mesures à prendre pour mettre l’Algérie en état de résister à l’invasion par une puissance européenne peuvent, après achèvement des travaux en cours d’exécution, se résumer de la manière suivante : constitution de places de manœuvre en vue de la défensive à Béni-Mansour, Constantine[1] et Duvivier, amélioration des défenses de la côte et du réseau sémaphorique, construction et amélioration de certaines voies ferrées[2], constitution d’un matériel de transport et de traction suffisant sur les chemins de fer, pour qu’on ne soit pas exposé en cas de guerre à se trouver à court, ainsi qu’on l’a été parfois en pleine paix, lorsque se produisaient des événemens fortuits, tels que d’abondantes récoltes de céréales.

  1. Constantine située à plus de 20 lieues de la mer, dans une position naturellement très forte et destinée à devenir à la fois le grand arsenal et la grande place de manœuvre de l’Est. Actuellement, elle n’est pas en état de résister à un coup de main tenté par des troupes européennes ; il serait indispensable d’y pourvoir. Il en est un peu de même de certains points de l’enceinte d’Oran.
  2. En examinant une carte de l’Algérie, on remarque que sur une distance de plus de 800 kilomètres, la ligne ferrée d’Oran à Tunis n’est exposée qu’en un seul endroit à un coup de main venant de la mer. Le point dangereux est entre Ménerville et Alger. Une ligne ferrée est projetée de Bouira à Berrouaghia, il suffirait de la continuer de Berrouaghia sur Affreville pour assurer d’une manière complète et sûre les communications de l’est à l’ouest.