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Aucune ligne du réseau secondaire ne nécessite une voie large ; avec un écartement de un mètre, on réduirait sensiblement la dépense[1]. La largeur de la voie pourrait même être abaissée à 0m, 75 pour les lignes exclusivement agricoles dont l’infrastructure et la superstructure seraient réduites au minimum. Il ne s’agit en effet, dans ce cas, de rechercher ni la vitesse, ni le confortable, et le peu de longueur de chaque tronçon permettrait de se contenter, pour le transport des voyageurs, de voitures d’un modèle des plus simples.

Indépendamment de l’avantage considérable que procurerait à l’agriculture et à la colonisation l’ouverture de nouveaux débouchés, la sécurité deviendrait de plus en plus grande. Comment ne pas remarquer aussi que l’afflux vers le réseau principal de nouveaux produits du sol viendrait atténuer les déficits actuels d’exploitation et diminuer le montant de la garantie d’intérêt qui pèse si lourdement aujourd’hui sur le budget ?

La question des voies de pénétration vers le Sud est beaucoup plus complexe. Tout d’abord, on se trouve en présence des rivalités locales ; chaque département, — et ce n’est pas là un des moindres argumens contre Indivision administrative actuelle, — tient à avoir sa ligne de pénétration. Alger, comme capitale de la colonie, veut absorber le futur transsaharien ; Constantine et Oran font valoir la plus grande longueur de leurs lignes de pénétration existantes. Ainsi résumée, la question se précise et la faiblesse des argumens d’Alger apparaît de la manière la plus évidente. Le sud de cette province n’est ni plus riche ni plus peuplé que celui des deux autres, et il n’est menacé d’aucun côté par les populations voisines. Il contient, il est vrai, le pays du M’zab, dont la population industrieuse essaime dans toute l’Algérie, et cette peuplade, rompue au commerce et aux finesses de la diplomatie orientale, exerce, dit-on, une influence occulte considérable à Alger. Mais ce n’est pas pour satisfaire les intérêts d’un groupe de 40 000 indigènes que l’on peut entreprendre la construction d’une voie ferrée de plus de 400 kilomètres de longueur ; que la ligne actuelle soit prolongée jusqu’à Boghari, porte du désert, c’est tout ce qu’on peut raisonnablement souhaiter.

Tout autre est la situation dans les deux départemens de l’Est et de l’Ouest. On l’avait si bien compris, il y a déjà une

  1. La moyenne du prix de revient du kilomètre de voie d’un mètre est d’environ 110 000 francs en Algérie.