Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 15.djvu/136

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vous aviez été à portée de le recevoir assez à temps. Je ne prévois pas que vous ayez trouvé des obstacles, qui ayent pu vous arrêter d’exécuter ce dessein. En tout cas, j’espère que le même zèle, qui vous y a déterminé, vous aura fourni les moyens de les surmonter[1]. »

Assuré désormais de l’approbation de son maître, Château-Renault redoubla d’ardeur et pressa plus vigoureusement encore le chargement des navires. Le 10 juin, il peut enfin sortir de la Vera-Cruz et le lendemain la flotte appareille, tandis que devant l’image miraculeuse de Notre-Dame-des-Remèdes, solennellement apportée en son église cathédrale, l’archevêque de Mexico implore pour les galions, par l’intermédiaire de la Vierge sainte, le secours du Tout-Puissant.

Aucun ennemi ne vint d’ailleurs troubler leur route à travers le golfe du Mexique. Bembow était hors d’état de quitter le Port-Royal, où ses équipages anémiés fondaient dans de telles proportions que, pour les maintenir à une composition normale, il en était réduit à dégarnir de matelots les navires anglais de passage à la Jamaïque.


VI

Malheureusement, la division restée à la Havane sous les ordres de Nesmond avait, elle aussi, grandement souffert, car les autorités locales s’étaient bientôt déclarées incapables de lui procurer les secours, tout d’abord promis en abondance.

En effet, malgré les splendeurs de sa capitale, Cuba, comme tant d’autres colonies espagnoles, ne se trouvait pas dans une situation prospère.

« La ville de la Havane, écrivait alors un des officiers de l’escadre française, est bien bâtie pour un pays aussi éloigné. Les rues y sont fort belles, larges et longues. Il y a quantité de belles églises, d’assez beau monde. Surtout les femmes y sont fort bien faites, et ont le teint aussi beau qu’en aucun autre endroit.

« Le port en est fort grand. L’entrée en est soutenue par deux très beaux forts, surtout celui que l’on nomme Le More. C’est un des plus beaux ouvrages que l’on puisse voir, tant par

  1. 5 avril 1702. — Archives de la Marine.