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l’Evangelicalism, qu’il adressait ses lettres d’appel au clergé, lettres que ce journal s’empressait d’insérer en les proclamant « admirables[1], » C’était aussi de concert avec des low-churchmen que Pusey rédigeait une déclaration que le clergé était invité à signer en masse ; cette déclaration affirmait la foi de l’Église dans l’inspiration de la Bible et dans l’éternité des peines. Pendant qu’on recueillait les signatures, la polémique se poursuivait de plus en plus passionnée. Les orthodoxes s’en prenaient surtout à Tait, qu’ils accusaient d’avoir trahi l’Église, en votant, dans le tribunal, avec les légistes contre les archevêques. De leur côté, les libéraux reprochaient aux promoteurs de la déclaration d’exercer une pression sur le clergé inférieur pour le contraindre à la signer. Pusey, bien que malade, publiait une brochure véhémente où il proclamait « l’Église en danger » et Keble s’associait publiquement à ce cri d’alarme. Ce même Pusey engageait, avec Maurice, dans le Times, une controverse, assez âpre de ton, « Nous adorons des dieux différens, » écrivait-il, et Maurice acquiesçait[2]. Ce dernier n’avait approuvé ni le fond ni la forme des Essays ; il avait même publié, avec ses amis, des tracts qui tendaient à les contredire. Mais il approuvait moins encore l’acharnement des orthodoxes à sévir contre les Essayists, et il lui paraissait que le plus important était de faire échec à l’intolérance de ce qu’il appelait une « fausse orthodoxie. » Lui, qui se piquait d’être opposé à l’érastianisme, en venait à voir, dans la juridiction religieuse des cours civiles, une protection contre la tyrannie théologique.

Cependant, la déclaration préparée par Pusey faisait son chemin dans les presbytères, et, au bout de quelque temps, elle avait réuni onze mille signatures. C’était environ la moitié des clergymen du royaume. Il est vrai que ces signatures venaient surtout des rangs inférieurs du clergé ; ceux qui étaient arrivés, — deans, professeurs d’Université, head masters de grandes écoles, — avaient moins donné. Quoi qu’il en fût, ce chiffre n’en était pas moins un avertissement pour les évêques, d’autant qu’en même temps une adresse de laïques réunissait 137 000 adhérens. Wilberforce se sentit donc encouragé, lors de la réunion de la Convocation, en avril 1864, à reprendre la proposition d’action synodale, admise en principe trois ans auparavant et ajournée à cause

  1. Life of Pusey, t. IV, p. 49 à 52.
  2. Ibid., t. IV, p. 57 à 62.