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Jusque-là les comptoirs portugais, échelonnés sur la côte du Mozambique du 10e au 27e degré de latitude sud, étaient, surtout depuis l’abolition de la traite, dans le marasme et la stagnation ; les ports, Mozambique, Sofala, Tété sur le Zambèze, faisaient encore quelque commerce ; mais les Portugais qui, au XVIIe siècle, avaient fondé des comptoirs jusqu’aux bords du Nyassa et exploré la région du lac Moero et des sources du Congo, ne pénétraient plus que rarement dans l’intérieur, et encore était-ce presque toujours clandestinement, en vue d’un commerce louche. Quant aux Anglais, ils étaient confinés à l’extrême sud, au Cap et au Natal, et séparés des établissemens portugais par les populations boers et par des tribus nombreuses et redoutables d’indigènes. La puissance magique de l’or changea brusquement cette situation ; comme un irrésistible aimant, il attira du sud les Anglais tandis que, de l’est et de l’ouest, les Portugais s’avançaient pour faire revivre leurs droits anciens, réoccuper tout le bassin du Zambèze, et joindre leurs possessions de l’Atlantique à celles de l’océan Indien.

Ce fut après le traité du 24 février 1884, qui ruinait à jamais les prétentions portugaises sur le cours du Congo et fixait la frontière entre l’Angola et l’État indépendant, que le gouvernement de Lisbonne dirigea surtout ses efforts vers les pays du Zambèze. Le major Serpa Pinto, de Saint-Paul de Loanda au Natal, ouvrit à travers l’Afrique, d’une mer à l’autre, une voie nouvelle[1] ; Capello et Ivens, dans un mémorable voyage, étudièrent avec une grande précision les hauts affluens de gauche du Congo et, partis de Mossamédés sur l’Atlantique, parvinrent à Quilimané sur l’océan Indien. Les uns et les autres reliaient par leurs itinéraires la côte du Mozambique à celle de l’Angola, et, au cours de leurs traversées transafricaines, ils n’avaient pas négligé de nouer des intelligences avec les chefs et de préparer les voies à la domination portugaise. En même temps, de la côte du Mozambique, des officiers s’avançaient pour rétablir l’autorité effective du Portugal sur les plateaux de l’intérieur. : de 1885 à 1887 MM. Cordon et Païva d’Andrade visitèrent les pays au sud du Zambèze et spécialement le Machona.

Mais déjà, à la même époque, des missionnaires et des voyageurs britanniques, se glissant entre les steppes déserts de

  1. Comment j’ai traversé l’Afrique, par le major Serpa Pinto. Paris, Hachette, 2 vol.