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mier point donc, à savoir la soumission aux évêques, l’accord peut indubitablement se faire, si on le veut à Paris, autant qu’on y est disposé à Rome. Il en est de même sur le second. Sans doute il est délicat de limiter le nombre des congrégations religieuses et des maisons qui s’y rattachent, et plus délicat encore de limiter le chiffre de leur fortune ; cependant cela n’est pas impossible. M. le ministre des Finances vient de publier deux énormes volumes qui contiennent la nomenclature des biens immeubles possédés par les congrégations. Un tel travail a besoin d’être contrôlé ; mais, tel qu’il est, il pourrait servir de base à une discussion sérieuse, si on la soutenait de part et d’autre avec bonne foi et bonne volonté. Cette bonne volonté, la trouverait-on à Rome ? Ici encore, la lettre du Saint-Père nous fournit la réponse. Après avoir rappelé les inquiétudes manifestées au sujet de la fortune croissante des congrégations : « Passant sous silence, dit-elle, d’autres considérations, nous nous bornons à cette importante remarque : la France entretient avec le Saint-Siège des rapports amicaux fondés sur un traité solennel. Si donc les inconvéniens que l’on indique ont sur tel ou tel point quelque réalité, la voie est tout ouverte pour les signaler au Saint-Siège, qui est disposé à les prendre en sérieux examen et à leur appliquer, s’il y a lieu, des remèdes opportuns. » Cette fois, il serait difficile d’être plus explicite, et, sans forcer le sens des termes dont s’est servi le Saint-Père, on peut y voir une suggestion ou même une invite. Seront-elles accueillies à Paris ? La bonne politique le conseillerait ; mais on en suit de préférence une autre, celle-là même qui a inspiré le projet tout jacobin qui consiste à supprimer les congrégations non autorisées et à les spolier. Par malheur, l’expérience a prouvé que ces procédés ne réussissent pas, ou qu’ils ne le font que pour un temps. Ce sont des expédiens, ce n’est pas une solution.

Léon XIII, dans sa lettre, parle avec éloquence des intérêts de notre protectorat catholique au dehors. Les considérations qu’il présente à ce sujet sont celles que nous avons reproduites souvent ici même, avec une autorité moins grande. Le Pape s’étonne de la contradiction qu’il y a dans notre conduite. Nous tenons essentiellement à notre protectorat ; tous les gouvernemens qui se sont succédé en France, — et l’on sait combien ils ont différé de tendances et de caractères ! — ont également compris qu’il y avait là un instrument d’influence, et nous avons pu mesurer, dans ces derniers temps, à quel point il était encore précieux, par l’acharnement qu’on a mis à nous le disputer. Sur ce terrain encore, et surtout, nous avons besoin du