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Je m’obstine à discuter quand même, d’abord parce que chez certains peut exister, si l’on peut, ainsi parler, la bonne foi de la haine, confondant dans un même sentiment la défense républicaine et l’horreur des congrégations ; à ceux-là je tiens encore à dire, à sincèrement affirmer que, du fait des congrégations, la République n’est pas en péril, que ceux qui demandent pour elles la loi commune, non le rôle de parias, n’entretiennent pas les noirs desseins dont on pourrait les croire capables. Ensuite, parce qu’il n’y a pas seulement des sectaires ; il y a la masse des esprits que la passion n’affole pas, et je ne consentirai jamais à croire que cette masse ne soit pas assez considérable pour qu’en lui parlant loyalement, honnêtement droit et justice, on ne puisse parvenir à établir en elle un courant de loyauté et d’honnêteté assez puissant pour qu’il impose silence aux sectaires eux-mêmes.

Allons-nous rentrer dans les querelles religieuses, dans ces luttes qui, troublant les consciences, secouant les âmes, agitent les sociétés jusque dans le tréfonds ? Y aura-t-il encore des persécutés et des proscrits ? Ne ; sommes-nous capables que d’inscrire le nom de la liberté sur nos murailles, sans pouvoir lui faire sa place ; dans nos cœurs ? La liberté ! Faudra-t-il que nous la voyions violée par ceux qui l’ont le plus hautement proclamée, que nous trouvions le droit méconnu par les fils des hommes qui, au début de ce grand mouvement de la Révolution française qu’on doit comprendre et respecter, l’ont magnifiquement déclaré ? N’avons-nous pas assez de causes de discordes ; faut-il en ajouter encore ?

En tout cas, comme ils étaient sages, ceux qui, en 1872, en 1883, écartaient des débats faits surtout pour rendre les divisions plus profondes, les haines plus acérées, pour amonceler de sombres nuages dans un ciel déjà bien assez chargé de tempêtes !


T. CREPON.