Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 1.djvu/231

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’évaporation. Il n’y a rien de plus limpide que l’eau d’une flaque marine reposée. Inversement, l’eau de la Baltique, qui est, de toutes les mers, la moins salée, a souvent une couleur jaune due aux particules terreuses qui y restent en suspension : l’eau de la Méditerranée, d’une salure beaucoup plus forte, est, lorsqu’elle est calme, d’une belle couleur bleue, non seulement parce qu’elle reflète l’azur d’un ciel incomparable, mais parce qu’elle dépose facilement les débris terreux ; pour la même raison, les mers intermédiaires ont une couleur mixte, c’est-à-dire verte.

Après les particules terreuses, l’eau de mer dépose les sels les moins solubles de la série qu’elle contient : le carbonate de chaux, puis le sulfate de chaux ou gypse. Après cela, c’est le sel proprement dit, le chlorure de sodium qui se montre et qui fournit la couche la plus épaisse. Enfin, au-dessus du chlorure de sodium, les sels déliquescens (chlorure de potassium, et surtout chlorure et sulfate de magnésium), forment la dernière assise. On peut se contenter de ce schèine fort simplifié, qui réduit le dépôt à quatre assises superposées, correspondant aux phases successives de la précipitation, et, par conséquent, aux degrés de solubilité : le sable, — le sulfate de chaux, — le chlorure de sodium, — les sels déliquescens.

Telle est la composition du dépôt normal.

Il n’est pas besoin de rappeler que l’extraction du sel de l’eau de mer, dans les salines artificielles, a précisément pour principe d’éviter le dépôt total, dont le produit serait inutilisable. Au contraire on s’arrange de manière à sérier les diverses phases de la précipitation : on les fait s’accomplir dans des bassins différens, ce qui permet d’en séparer les matériaux. Ce soin industrieux permet de recueillir à part le sel alimentaire, et de l’offrir à la consommation débarrassé des substances qui lui donneraient une saveur insupportable. L’eau de mer est impropre aux usages culinaires, précisément parce que ce départ n’est point fait. Il y a bien longtemps que l’on sait, grâce au chimiste Macquer, qu’elle doit aux sels déliquescens et particulièrement aux sels magnésiens l’amertume qui la rend impotable et nauséeuse.

Le sel comestible devrait être exempt de ces sels déliquescens. Il en retient, en réalité, une proportion minime qui modifie légèrement la saveur propre au chlorure de sodium. Cependant la présence de cette petite quantité, si elle n’altère pas profondément le goût du sel, présente un autre inconvénient : elle en