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à partir du mois d’octobre 1896[1], sans parler des nombreuses concessions temporaires qui ne confèrent pas aux étrangers la propriété des lignes ; 6° l’ouverture à la navigation européenne de toutes les eaux intérieures dans les provinces où sont situés des « ports de traité », accordée aux instances de l’Angleterre en juin 1898.

Le lecteur sait comment la Chine a, depuis les temps les plus reculés, pris une place, de jour en jour agrandie, dans la société des peuples. Or, à quelque groupe de la race humaine que l’homme se rattache, il est, par le seul fait de cette agrégation, revêtu de certains droits, astreint à certains devoirs. Envisagé comme membre de la famille ou de la tribu, il contracte envers l’une ou l’autre une série d’obligations, et peut exiger qu’on s’acquitte envers lui d’obligations corrélatives. Il en est de même de l’être collectif placé dans la communauté internationale des États organisés. J’ajoute que ces obligations deviennent plus nombreuses à mesure que le lien se resserre, Dans la seconde partie du XIXe siècle, les liens se sont nécessairement resserrés. Les chemins de fer, la navigation à vapeur, la traction par l’électricité, les télégraphes, les téléphones, centuplent, par la force des choses, les rapports internationaux. Il n’y a pas moyen de remonter ce courant irrésistible. Or la multiplicité des échanges et des relations engendre la multiplicité des obligations internationales. Nous aurons à tirer plusieurs déductions de ce principe et nous déterminerons en conséquence la situation juridique de la Chine dans le monde civilisé.


II. — COMMENT LA CHINE OBSERVE LES LOIS DE LA MORALE INTERNATIONALE

Le Céleste-Empire est uni par un grand nombre de traités aux puissances de l’Europe et de l’Amérique. S’il s’agissait d’un peuple sauvage, dépourvu de toute conscience juridique, tout le droit international résiderait dans la lettre de ces conventions. Mais il s’agit d’un peuple qui possède une civilisation séculaire, des lois, une administration, une armée à peu près régulière, et qui participe à la communauté internationale des États civilisés. Dès lors, cette communauté peut lui demander l’observation de quelques règles élémentaires, primordiales, générales, extérieures

  1. Date de la convention russo-chinoise, dite convention Cassini, à la suite de laquelle fut fondée la compagnie russe de l’Est chinois.