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français ne sauraient être frappés d’aucun droit quelconque. »

Le droit de juridiction exercé par les consuls de l’Europe et de l’Amérique sur leurs nationaux dans le Levant, dans les pays musulmans ou barbaresques et dans plusieurs pays de l’Extrême-Orient porte une grave atteinte à la souveraineté d’États indépendans et pleinement constitués. Il n’y avait pas, sur ce point, avant les traités de Nankin et de Whampoa, d’entente possible entre les Occidentaux, qui s’efforçaient de soustraire par tous les moyens possibles leurs ressortissans à une justice entièrement différente de la leur, et les mandarins qui tenaient invariablement dans les négociations entamées après la guerre de 1840, ce langage aux étrangers : « Puisque vous réclamez la protection de nos lois, commencez par vous soumettre à ces lois[1]. » Le Fils du Ciel dut céder en 1842 et laisser constituer au profit des Anglais, des Américains, des Français, sur le sol même de son empire, un pouvoir judiciaire extra-territorial. Toute équivoque est dissipée. « Si, malheureusement, il s’élevait quelque rixe ou quelque querelle entre des Français et des Chinois, comme aussi dans le cas où, durant le cours d’une semblable querelle, un ou plusieurs individus seraient tués ou blessés soit par des coups de feu, soit autrement, les Chinois seront arrêtés par l’autorité chinoise, qui se chargera de les faire examiner et punir, s’il y a lieu, conformément aux lois du pays. Quant aux Français, ils seront arrêtés à la diligence du consul, et celui-ci prendra toutes les mesures nécessaires pour que les prévenus soient livrés à l’action régulière des lois françaises, dans la forme et suivant les dispositions qui seront ultérieurement déterminées par le gouvernement français[2]. Il en sera de même en toute circonstance analogue et non prévue dans la présente convention, le principe étant que, pour la répression des crimes ou délits commis par eux dans les cinq ports, les Français seront constamment régis par la loi française. » « Les Français qui se trouveront dans les cinq ports dépendront également, pour toutes les difficultés ou les contestations qui pourraient s’élever entre eux, de la juridiction française. En cas de différends survenus entre Français et étrangers, il est bien stipulé que l’autorité chinoise n’aura à son mêler d’aucune manière[3]… »

  1. Voyez la première lettre de M. Adolphe Barrot dans la Revue du 15 février 1842.
  2. Ce qui fut fait par la loi du 8 juillet 1852.
  3. Articles 27 et 28 du traité. Ces deux textes doivent être combinés avec l’article 25, qui détermine la compétence des consuls pour le règlement des contestations civiles entre Chinois et Français.