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que les élections qui ont assuré au parti républicain dont il est le représentant la majorité à la Chambre et au Sénat. Quand nous parlons de la réélection de M. Mac Kinley, le mot n’est pas tout à fait exact. Aux États-Unis, les opérations électorales pour la présidence de la République se font en plusieurs épreuves : mais la première seule est importante, parce que les électeurs chargés d’élire le président reçoivent an mandat impératif. On sait par avance quelle sera la majorité de M. Mac Kinley : elle sera de 137 voix, elle n’avait été que de 95 en 1896. Le parti républicain peut par conséquent se flatter d’avoir gagné du terrain depuis quatre ans. Au début de la campagne électorale, il semblait difficile de prédire lequel des deux candidats en présence l’emporterait ; une troisième candidature pouvait d’ailleurs se produire et compliquer la situation ; mais elle ne s’est pas produite, et, à mesure qu’on se rapprochait du dénouement, le succès de M. Mac Kinley devenait de plus en plus probable. Les derniers jours avant l’élection, il était certain.

M. Bryan était le champion du parti démocrate : le résultat a montré que ce choix n’était pas le meilleur possible. Quelles que soient les qualités personnelles de M. Bryan, — il est doué d’une activité et d’une éloquence également infatigables, — les souvenirs de sa campagne de 1896 pèsent encore sur lui, et ont éloigné beaucoup d’électeurs de sa candidature. On n’a pas oublié qu’il y a quatre ans, M. Bryan avait choisi pour plate-forme électorale la libre frappe de l’argent. Appartenant aux provinces argentifères de l’Ouest, il avait cru y trouver en adoptant ce programme, et il y avait trouvé effectivement une clientèle nombreuse et ardente ; mais en même temps il avait fait naître les inquiétudes les plus vives et les plus légitimes dans le reste des États-Unis. S’il l’avait emporté à cette époque, l’Amérique aurait été soumise à une crise économique dont le contre-coup se serait étendu très loin, et dont elle aurait eu de la peine à se relever. Lorsqu’on a qualifié alors M. Bryan de candidat de la fausse monnaie, on lui a donné une qualification sévère, mais non pas imméritée. La véhémence, et même la violence révolutionnaire avec laquelle il soutenait sa thèse, avait définitivement indisposé contre lui beaucoup de bons esprits, et ce n’est pas après quatre années seulement que tout cela pouvait être oublié. Il pouvait l’être d’autant moins que dans sa campagne nouvelle, M. Bryan ne renonçait pas à sa revendication en faveur de l’argent ; elle faisait toujours partie de son programme. Elle y était passée, à la vérité, à un plan secondaire ; peut-être même n’y figurait-elle que pour la forme ; néanmoins cela