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celui des capitaux, va de plus en plus devenir universel. Depuis longtemps déjà, les prix des matières que nous appellerons précieuses tendaient à s’égaliser dans les divers pays : mais aujourd’hui, grâce à la facilité sans cesse accrue des transports, ce nivellement s’opère même pour des marchandises pondéreuses, comme les minerais de fer et la houille. Nous avons montré l’anthracite de Virginie arrivant dans les ports de la Méditerranée et approvisionnant nos chemins de fer. Bientôt Paris, Londres, Saint-Pétersbourg, Pékin, Melbourne, Yokohama, San Francisco, New-York ne formeront que les parties d’un même tout, qui sera le marché mondial, dans lequel l’équilibre s’établira à chaque instant entre les offres et les demandes émanées des divers points du globe.

Cette considération est une de celles qui doivent nous rassurer sur l’élévation indéfinie des prix, que les événemens récens ont pu faire redouter un moment à ceux qui ne se rendent pas compte de l’évolution qui s’accomplit. Grâce au développement des relations internationales, toutes les richesses naturelles de pays encore fermés aujourd’hui seront exploitées. Nous avons indiqué quelles réserves de houille et de minerai enfermaient des contrées en partie vierges, comme les États-Unis, ou entièrement inexplorées, comme presque tout le territoire de la Chine. Il nous semble inutile de chercher à prévoir quelles seront les conditions d’existence de l’humanité, lorsque, dans quelques milliers d’années, les couches de houille que nous connaissons ou devinons auront été épuisées et que les gisemens métalliques eux-mêmes se feront plus rares. Aussi loin que la prévoyance d’une génération puisse s’étendre, nous avons le droit de dire que nos arrière-petits-neveux sont assurés de ne manquer ni de fer ni de charbon.

Ce n’est donc pas de ce côté du problème qu’il y a lieu de nous préoccuper, mais bien plutôt de la succession des phénomènes qui ont marqué jusqu’ici l’évolution industrielle et sur lesquels nous voudrions, avant de terminer, attirer l’attention de nos lecteurs. Cette évolution, dans les temps modernes, suit à peu près régulièrement la marche que voici : l’équilibre entre la production et la consommation n : est pas rompu en général par ce que nous appellerons l’offre et la demande normales ; les besoins des particuliers ne subissent pas, d’une année à l’autre, des modifications assez radicales pour provoquer à eux seuls les écarts soudains de prix et les changemens d’aspect du marché de