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sorte qu’elles n’ont guère d’autre valeur que celle d’un billet de banque, et constituent ce que M. Cernuschi appelait spirituellement l’assignat métallique. Cependant, en dépit de cette démonétisation accomplie dans presque toute l’Europe et aux Etats-Unis d’Amérique, aux Indes, au Japon, dans les colonies anglaises, en Égypte, en Tunisie et dans bien d’autres pays, la production de l’argent ne diminue que lentement : elle atteint encore 5 434 tonnes en 1809, contre 5 929 en 1898[1] ; elle est très supérieure à ce qu’elle était il y a dix ans, puisqu’elle n’atteignait pas 4 400 tonnes en 1890.

Le cours du métal, qui avait subi, à diverses reprises depuis 1870, des fluctuations violentes, est maintenant assez stable aux environs de 100 francs le kilogramme : lorsque la valeur commerciale des deux métaux correspondait à leur rapport légal de 1 à 15 et demi, ce cours était de 220 francs. Le maintien d’un niveau de prix relativement élevé (100 000 francs la tonne environ) s’explique par les besoins de monnaies divisionnaires, qui sont encore partout frappées en argent, par les habitudes invétérées d’une partie de l’Afrique, Ethiopie, Madagascar, Soudan, etc., de la Chine et de l’Indo-Chine, qui persistent à se servir du métal blanc pour leurs échanges, et, dans une certaine mesure, par les emplois industriels de l’argent, qui se sont développés à mesure que le prix du métal baissait.

De quelque côté que nous tournions nos regards, nous voyons les hommes redoubler d’efforts pour arracher de la terre les richesses métalliques qu’elle recèle en ses lianes : nous ne sommes, sous ce rapport, ni à l’âge d’or ni à l’âge de fer, mais plutôt à l’âge métallique, tant est grande l’ardeur de la recherche de ces substances qui, à des titres divers, sont devenues indispensables à la complication de la vie moderne. La grandeur des chiffres, l’énormité du tonnage extrait des profondeurs du sol, est surtout frappante en matière de fer et de charbon. Les progrès accomplis pour les autres métaux n’en sont pas moins remarquables.


IV

Le mouvement prodigieux qui, depuis bientôt deux ans, a emporté dans un tourbillon de hausse le fer et le charbon s’est calmé

  1. Rothwell indique le chiffre de 5 575 tonnes pour l’année 1898.