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seulement l’acier américain, c’est le capital accumulé de l’autre côté de l’Océan qui vient alimenter les marchés de l’Ancien Monde.

Une des conditions favorables de l’industrie métallurgique américaine est la grandeur des débouchés. Cette question est vitale en matière industrielle, puisque c’est la possibilité d’écouler le même objet un nombre de fois considérable qui permet d’en abaisser le prix de revient. Une usine organisée pour fabriquer des poutrelles d’un certain profil et qui travaillera du 1er janvier au 31 décembre sans modifier ses trains, réalisera de tout autres bénéfices que celle qui sera obligée de modifier sans cesse ses types au gré d’acheteurs qui exigeront chacun des modèles différens pour le même objet. Sa supériorité sera encore bien plus marquée par rapport à une entreprise obligée de se livrer à un grand nombre de fabrications diverses[1]. Une fois les données industrielles résolues, une fois l’emplacement de l’usine, à proximité du minerai et du charbon, déterminé, une fois la force motrice installée, les appareils construits, le problème devient commercial : la question est de savoir combien de centaines ou de milliers de tonnes de produits fabriqués pourront être écoulés chaque jour. Des époques de grande activité comme celle que nous venons de traverser peuvent faire illusion ; la demande est si forte que, pendant une certaine période, personne ne semble plus se préoccuper de la question capitale de la vente ; les métallurgistes ne reçoivent plus la houille en quantités suffisantes ; à leur tour, ils ne servent pas la totalité des commandes de leurs acheteurs ; 720 millions de tonnes de charbon, 40 millions de tonnes de fonte, ne suffisent pas à l’appétit dévorant de l’humanité : mais cette fièvre est passagère, et la consommation ne tarde pas à reprendre une allure normale, à laquelle les mines et les établissemens de fonte et de fabrication suffisent d’autant plus aisément que beaucoup d’entre eux, sous l’influence de la poussée, ont augmenté leurs moyens d’action.


III

Si le fer est, sans comparaison possible, le métal qui représente le tonnage le plus considérable, il n’en est pas moins

  1. La récente circulaire du ministre des Travaux publics aux Compagnies de chemins de fer français au sujet des types de locomotives répond bien à cette préoccupation.