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célèbre, de Stanley Jevons qui, admettant une loi de progression géométrique dans la population et dans l’usage de la houille, assignait l’année 1971 comme terme à l’existence des gisemens anglais. L’émotion provoquée dans le Royaume-Uni par cette prédiction amena, en 1866, la constitution d’une commission, qui étudia la question et présenta son rapport cinq ans plus tard : elle concluait à l’existence de 146 milliards de tonnes à extraire à une profondeur de moins de 1 200 mètres, ce qui donnerait une durée de 1 270 années avec une consommation annuelle de 115 millions de tonnes, et de 1 000 années avec une consommation annuelle de 146 millions. Ces chiffres s’écartaient fort des évaluations de M. Price Williams, établies sur une progression arithmétique, à raison d’un accroissement de 3 millions de tonnes par an, et dont la conclusion était l’épuisement en 276 ans. Les divers calculs ne prenaient pas seulement en considération la consommation indigène, mais, puisque l’Angleterre exporte tous les ans une partie du charbon extrait de ses mines, la totalité de ce qui est demandé à ses houillères. M. Hull, plus récemment, a évalué à 80 milliards de tonnes environ les approvisionnemens au début du XXe siècle : il critique les évaluations de la commission de 1866 comme excessives ; il lui reproche d’avoir compté des veines trop minces pour être exploitées utilement et d’avoir fait double emploi pour un certain nombre de superficies.

Un autre élément de calcul qu’il faudrait ne pas négliger est la question des méthodes d’exploitation, souvent défectueuses en Angleterre, où le système de location des houillères pour un temps limité conduit les fermiers, dans bien des cas, à saccager le gisement : on a estimé par exemple que les deux tiers de la célèbre veine Ten Yard du Staffordshire ont été perdus, faute d’une organisation rationnelle et de travaux préparatoires suffisans. Whittaker (History of the fossil fuel) évalue la perte moyenne, par suite d’une mauvaise exploitation, au quart des quantités produites. Quand nous aurons rappelé que les exportations de charbons anglais s’élèvent en ce moment à environ 36 millions de tonnes par an, c’est-à-dire à peu près la production française, nous aurons achevé de donner au lecteur une idée des élémens du problème si compliqué, que nous indiquons plutôt que nous ne cherchons à le résoudre.

La question d’épuisement devant être traitée au point de vue mondial, il convient de rappeler la superficie des terrains