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que les masses électorales s’accommodant en somme de ce système, quelque critiquable qu’il puisse être, leurs chefs sont implicitement autorisés par les intérêts du parti qu’ils personnifient à user de tous les moyens les plus propres à assurer le succès de leurs candidats.

C’est vers ce but que vont converger leurs efforts pendant les quelques mois qui précèdent la réunion de la Convention. Tous les modes de propagande susceptibles d’influer sur l’esprit des foules sont successivement mis à contribution. Meetings-monstres où l’éloge du candidat est prononcé par les orateurs du parti, exhibitions d’emblèmes reproduisant son image[1], défilés de clubs politiques, véritables processions avec bannières appropriées à la circonstance, rien n’est négligé pour éveiller en sa faveur les sympathies publiques.

Comme de juste, la presse joue dans ces manifestations un rôle prépondérant. On en comprendra toute l’importance si l’on songe qu’aux États-Unis les dimensions d’un journal quotidien dépassent trois ou quatre fois celles d’un journal français et qu’elles atteignent le dimanche les proportions d’une véritable encyclopédie, où toutes les informations, si étendues qu’elles soient, peuvent aisément trouver place. Ne pas perdre de vue non plus qu’un journal politique américain est en même temps un journal illustré donnant parfois dans un seul numéro plusieurs centaines de vignettes, où tout homme de quelque notoriété est assuré de voir son portrait, plus ou moins fidèle, aussi souvent que son nom est mis en vedette par les événemens. On peut se figurer ce que devient dans ces conditions une campagne de presse systématiquement poursuivie pour la glorification d’un candidat célébré chaque matin et chaque soir par toutes les trompettes de la publicité.

Une entreprise aussi complexe ne peut être menée à bien que si elle est concentrée entre les mains d’un organisateur spécial chargé de tous les détails de cette mise en scène et disposant d’une autorité indiscutée de façon à imposer, s’il le faut, sa volonté. C’est le rôle du président du Comité national (national chairman). Il est d’ordinaire dévolu à une des notabilités du

  1. Il y en a de toutes les formes et de toutes les dimensions. Quelques-uns figurent une sorte de rosette qui peut se porter comme une décoration, constituant ainsi pendant toute la période électorale une réclame permanente pour le candidat dont le portrait reste fixé à la boutonnière de ses partisans.