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présider aux cérémonies de la vie de cour. En sa prime jeunesse, il s’était, assure Psellos, « livré sans pudeur, publiquement, aux plus folles orgies ; il avait eu mainte liaison amoureuse ; il avait adoré la société de ses compagnons de fête. » Brusquement le sentiment de sa responsabilité, le danger de l’empire, le transformèrent. Ce fut une conversion totale, comme celle qui marqua le réveil de Charles XII. Désormais plus de vin, plus de viande, et le coucher sur la dure. Basile II affecta la simplicité du soldat, qui met tout son luxe dans ses armes, et l’austérité d’un moine militaire. Nos Templiers et nos Hospitaliers, en leur âge héroïque, auraient pu l’adopter comme prototype. Yahia, un chrétien de Syrie qui écrit en arabe, nous dit : « Toute sa vie il ne but et ne mangea que le strict nécessaire… Jamais il ne se laissa aller à aucun confort. » Des deux frères, il fut le véritable empereur. Seul il dirigea le gouvernement, la diplomatie, la guerre. S’il édicta des Novelles, ce fut surtout en vue d’organiser les forces militaires de l’empire, de protéger contre les envahissemens des grands et des églises la terre des petits propriétaires, parce que cette terre était une sorte de fief, et que chaque fief faisait vivre un miles (stratiotès). Si on peut l’accuser d’avidité fiscale ou le louer de sa stricte économie, s’il laissa en mourant cette formidable encaisse métallique de 200 000 livres d’or, c’est que, pour avoir une bonne armée toujours prête à combattre, il faut un trésor de guerre toujours plein. Les prédécesseurs de Frédéric II, les Hohenzollern de la vieille Prusse, en savaient quelque chose. Cette parole « brève, abrupte, inculte, » c’est la voix du commandement. Le chroniqueur Zonaras affirme qu’il « préféra toujours être craint plutôt qu’aimé de ses sujets… Il ne pliait ni devant les lois ni devant les coutumes, n’en faisait qu’à son plaisir… Il allait droit au but, ne connaissant pas d’obstacles… Il n’employait dans le conseil et l’expédition des affaires que des gens sans naissance et sans instruction, auxquels il ne dictait que des dépêches écrites dans le style le plus rude, sans aucun souci de la forme. » Zonaras, ici, doit exagérer, par dépit de voir dédaigner ses pareils. Psellos expose les mêmes idées, mais sous une forme beaucoup plus équitable : « Ses secrétaires étaient des hommes obscurs, de mince éducation, mais sa correspondance fut toujours des plus brèves, si simple et tout à fait sans apprêt qu’elle n’exigeait pas de grandes capacités chez ses collaborateurs. Toujours il se refusa à écrire avec recherche, ou à user d’un style