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se révolte en lui à l’idée d’une lutte fratricide, il doit se mettre entre les deux. » Ces théories, qui substituent à la discipline militaire le libre arbitre civique, sont extraites du Petit Catéchisme républicain, de Jean Macé. Datées de 1848, elles n’avaient pas vieilli vingt ans après. Pour beaucoup de républicains, à la fin de l’Empire, armée permanente signifiait coup d’État : « Le crime du 2 Décembre, disait Rogeard, est un monstre dont l’armée et la police sont les deux jambes. » Et nation armée, au contraire, signifiait résistance éventuelle au coup d’Etat. Lorsque les hommes de l’opposition comparaient les deux systèmes, ce n’est point à des considérations militaires qu’ils avaient égard, mais bien à des considérations politiques, et ce n’est point sur les frontières nationales, mais bien sur les grilles du Palais-Bourbon, antiques frontières de la « liberté, « qu’ils attachaient leurs regards chargés de deuil. Or ils savaient, de par l’histoire, que lorsque les armées permanentes violaient ces grilles, c’était toujours pour le mauvais motif, — motif de Brumaire ou motif de Décembre, — et qu’au contraire, lorsque le peuple armé les franchissait, c’était pour le bon motif, puisque toujours, sous l’égide des piques coiffées de bonnets phrygiens, on finissait par fraterniser. Les professionnels des batailles parlaient, il est vrai, d’un certain « esprit militaire, » qu’ils réputaient indispensable à la formation du combattant, mais Jules Simon leur ripostait :


C’est là un esprit artificiel, qui résulte d’un grand nombre d’élémens très complexes. Prendre un homme au milieu de sa famille, l’éloigner, — car on y tient, — de son pays natal, le faire changer fréquemment de garnison ; l’obliger à demeurer dans une caserne, l’astreindre à la vie commune ; l’affubler d’un uniforme, lui faire porter le sabre, même dans la vie ordinaire, au milieu d’une population à laquelle le port des armes est soigneusement interdit ; lui donner des lois qui diffèrent de la loi commune, des juges qui ne sont pas ceux des autres citoyens, lui inculquer de certains principes qu’on aurait tort d’inculquer au reste de la nation et qu’on est obligé de lui inculquer à lui ; lui dire, par exemple, que son premier devoir est d’obéir immédiatement et sans réflexion à ses chefs, — je ne blâme rien, je constate, — tout cela résulte du principe des armées permanentes, et tout cela fait l’esprit militaire... En parlant ainsi des conditions de l’esprit militaire et de la façon dont vous le formez, je ne vous reproche pas de vous tromper, mais d’être conséquens avec un système déplorable et de substituer chez le soldat l’esprit militaire à l’esprit national.

M. EUGENE PELLETAN. — C’est l’esprit prétorien. (Bruit.)

M. JULES SIMON. — Quand je dis que l’armée que nous voulons faire serait une armée de citoyens et qu’elle n’aurait à aucun degré l’esprit militaire, ce