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la psychologie du sport.

gymnase, bon nombre d’exercices réunissent les mêmes élémens psychologiques ; entre l’homme et son trapèze volant, il y a aussi une harmonie intime…

Combien différens sont les sports de combat, non point seulement la lutte, — et l’escrime, ou la boxe, — qui sont des formes de la lutte, mais aussi la natation l’adversaire est une chose. On dit d’un homme : il nage comme un poisson. Rien n’est moins exact. Le poisson se meut normalement dans l’eau comme l’être humain sur le sol. La natation n’est pas normale. C’est un combat avec un élément hostile qui est le plus fort et qui aura le dernier si l’on ne se soustrait pas à son étreinte en temps voulu. La force des vagues rend sans doute le spectacle plus émouvant, mais l’onde la plus douce et la plus calme n’enlève pas au sport ce caractère combatif qui est son essence et fait son charme.

La bataille que le nageur livre au flot, l’alpiniste la livre à la montagne. On s’en aperçoit rien qu’à surprendre le regard dont il la mesure d’en bas, avant de commencer à en gravir les pentes. En effet, sous son masque impassible, elle va se défendre contre lui comme un adversaire vivant, l’égarant, le mystifiant, lui opposant une série déconcertante d’obstacles, d’énormes rochers à escalader, d’interminables pentes neigeuses à parcourir. Et ce ne sont là que des préliminaires. Elle tient en réserve, pour le perdre, d’épais brouillards qui l’envelopperont, des crevasses profondes qui s’ouvriront sous ses pas, de lourdes avalanches qui chercheront à l’entraîner dans leur course foudroyante ; elle tentera de le terrasser par le vertige, par la bise et par le froid ; et lui ne vaincra que par une virile combinaison d’énergie bien employée, de sang-froid voulu et de ferme prudence. Certes, c’est bien là une bataille, et de la catégorie la plus moderne, de celles que gagne la stratégie et non la fougue.

Par certains côtés, la course à pied ressemble à la natation. Le coureur est en conflit non avec un élément, mais avec lui-même, car il se force à soutenir une allure anormale pour laquelle il n’est point fait et qui, dès le départ, jette le trouble dans son organisme. Le caractère combatif s’affirme encore dans certains sports, ayant pourtant ceci de particulier que l’homme semble y demeurer plus ou moins passif en face de la force qu’il a déchaînée et dont parfois il cesse d’être le maître. Exemples : le yachting à voile, le tobogganing l’Ice yachting, l’aérostation et, provisoirement au