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qu’il s’agissait d’un budget momentanément en déficit, dont la métropole se verrait forcée, en dernière analyse, de combler les insuffisances en augmentant sa subvention aux frais des contribuables, on reconnaîtra qu’il y avait dans cette prétention de régenter une situation aussi exceptionnelle à l’aide de formules tout juste convenables pour nos antiques mœurs d’uniformité et de centralisation, de quoi faire perdre patience aux plus modérés. Un échange de correspondances assez vives eut lieu à ce propos entre les deux départemens ministériels : les Finances finirent par se rendre aux excellens argumens que les Colonies avaient à leur opposer ; et la loi de conversion, après avoir été encore quelque peu ballottée dans les commissions compétentes des Chambres, finit par être promulguée au printemps de 1897.

De cette manière, le budget local sortit enfin de ses limbes. Grâce aux nombreux perfectionnemens dont il fut l’objet par la suite et à la reprise des affaires qui résulta des progrès de la pacification, il ne tarda pas à prendre un rapide développement. La subvention de la métropole restant fixée à 1 800 000 francs, ce budget fait face, en 1900, à près de 14 millions de dépenses[1] ; il a laissé, dès 1897, un premier excédent de 1 287 000 francs qui a été versé en réserve ; en 1898, un second de 2 millions et demi ; en 1899, un autre excédent d’importance à peu près égale. On voit que si les fées qui entouraient son berceau avaient manqué de munificence, la vie même lui a été clémente[2].

Mais il ne suffisait pas, en 1896, de jeter les fondemens de l’avenir financier de la colonie nouvelle : il fallait encore préparer son développement économique en étudiant, et, s’il était possible, en construisant les voies de communication les plus essentielles.

  1. Dans ce chiffre est comprise une annuité de 1 700 000 francs pour un emprunt nouveau de 60 millions destiné à construire le chemin de fer de Tananarive à Andevorante ; plus «le deux millions sont en outre affectés à l’entretien de milices qui remplacent souvent les troupes payées par la métropole.
  2. Ce résultat est d’autant plus remarquable que l’application du nouveau régime douanier a privé la colonie de plus d’un million de droits d’entrée. Quant aux dépenses militaires payées par la métropole, elles ont pu, dès 1898, être réduites d’un cinquième pour rester fixées aux environs de 23 millions. Sur ce chiffre, près de trois millions sont exclusivement employés en frais de transport à l’intérieur de l’Ile ; le reste sert à l’entretien de la garnison, laquelle comprend 12 000 hommes, dont 3 000 Européens seulement.