Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 159.djvu/627

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et les crânes portaient encore les traces des terribles fractures causées par les coups de massue. Le squelette de Retief fut reconnu à la valise contenant l’acte par lequel Dingaan avait cédé aux Boers le territoire du Natal. Le curieux document, parfaitement intact, fut conservé par Henri Cloete, qui le déposa plus tard dans les archives de Pietermaritzburg où il doit se trouver encore aujourd’hui. Pretorius donna la sépulture aux martyrs du grand trek et fit graver sur les tombes la date de la victoire qui avait vengé leur mort.


VI

Les Boers renoncèrent à poursuivre leur ennemi fugitif et reprirent à petites journées la route de Port-Natal, où ils ramenèrent comme un légitime trophée 5 000 têtes de bétail. Au retour de leur heureuse expédition, ils ne furent pas peu surpris d’apprendre que le gouverneur du Cap, sir George Napier, avait, en leur absence, fait prendre possession de la baie de Natal par un petit détachement de highlanders commandés par le major Charters. Cette mesure avait été prise en vertu d’une proclamation du 14 novembre 1838, ordonnant « qu’il fût mis fin à une occupation non autorisée de territoires indigènes par certains émigrans de la colonie du Cap, sujets de Sa Majesté. » Le commandant avait reçu pouvoir « de rechercher et de saisir toutes armes et munitions de guerre qui, lors de la prise de possession de Port-Natal, seraient trouvées aux mains des habitans. » Comme un conflit était inévitable, l’officier anglais n’osa pas exécuter ses instructions : sur la promesse que les Boers n’entreprendraient rien contre les indigènes, il leur laissa leurs armes, et, pendant quelque temps, Anglais et Boers vécurent en bonne intelligence. Au bout d’une année d’inaction, vers la fin de 1839, le détachement anglais fut rappelé. Les Boers de leur côté constituèrent la république de Natalie et lui donnèrent pour capitale la ville qu’ils appelèrent du nom de Pietermaritzburg, en souvenir de Pieter Retief et de Gert Maritz. Ils nommèrent des landdrosts dans la nouvelle ville et à Durban, et y établirent un gouvernement régulier.

Cependant Dingaan, revenu du trouble de sa dernière défaite, renvoya aux Boers 316 chevaux qu’il leur avait enlevés, et leur fit savoir qu’il était disposé à traiter amicalement avec eux. Les Boers lui firent répondre qu’ils ne feraient la paix que lorsqu’il