Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 159.djvu/147

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Man, ne compte plus qu’un huitième de sa population parlant le sous-dialecte celtique connu sous le nom de « manx », s’étendait peu après à ces deux provinces, qui décidaient de prendre part à l’Eisteddfod de Cardiff et au Congrès de Dublin.

Quant à l’objet immédiat de ce congrés, dont l’Eisteddfod de Cardiff n’est que le séduisant portique, il était exposé comme suit par lord Castletown, prince d’Ossory, dans la réunion tenue le 2 décembre 1898, à l’hôtel de ville de Dublin, sous la présidence du lord-maire, sir James Henderson : « La Ligue panceltique, qui a pris l’initiative du congrès, se propose uniquement de réunir une fois en un temps donné des représentans des Celtes de toutes les parties du monde, Irlande, Écosse, Galles, île de Man, Bretagne, Amérique, Australie, etc., pour manifester aux yeux de l’univers leur désir de préserver leur nationalité et de coopérer à garder et à développer les trésors de langue, de littérature, d’art et de musique que leur léguèrent leurs communs ancêtres. » Un dessein si sage ne pouvait éveiller les défiances du gouvernement britannique. La présence du lord-maire en témoigna. Mais il apparaît assez que, si le prince d’Ossory ne couve pas de ténébreuses pensées et si le panceltisme doit rester, comme devant, une simple conviction littéraire, les historiens ont bien tort de s’en préoccuper. Sans doute il était malaisé de trouver pour les congressistes un autre terrain d’entente que la littérature et l’art. Du fait que les familles de race celtique sont disséminées dans des États différens, étrangers ou même hostiles les uns aux autres, il s’ensuit bien qu’un programme politique commun ne pouvait être élaboré du premier coup et sans quelque danger. Mais il ne s’ensuit pas que chacune de ces familles n’ait pas, en dehors des questions de littérature et d’art, ses aspirations propres et ses tendances bien définies. Et si ces tendances, ces aspirations ne peuvent être rapprochées et fondues présentement, pour recevoir l’unité d’impulsion que le Congrès entend donner aux questions d’ordre intellectuel, il ne s’ensuit pas non plus qu’un tel travail soit impossible ni même qu’on ne l’ait tenté déjà. Un rapide exposé des faits montrera où en est ce travail à l’heure où nous sommes. On en pourra déduire s’il y a quelque vérité dans la parole de M. Zimmer et s’il est croyable que l’opinion européenne ait un jour à compter avec le panceltisme, comme elle compte dès maintenant avec le panslavisme et le pangermanisme.