Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/813

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les anciennes corporations, mais s’occupent aussi des intérêts professionnels. C’est l’équivalent des chambres syndicales françaises. Elles existent surtout dans l’Allemagne du Sud. Elles se forment librement, mais elles sont soumises aux prescriptions de la loi et doivent se soumettre à toutes les règles édictées par le législateur, si elles veulent profiter des facilités que donne le nouveau droit civil allemand, qui reconnaît la personnalité civile à toutes les sociétés inscrites conformément à la loi.

Mais il ne faut pas se laisser duper par les mots. Ces corporations ou unions allemandes ne sont guère que des syndicats de patrons coalisés en vue de la défense des intérêts de la petite industrie. Les corporations font cependant une place aux ouvriers qui jouent un rôle dans certaines institutions accessoires, mais ce rôle subalterne et ces attributions mal définies contribuent au mécontentement et favorisent la propagande socialiste.

Presque partout, il s’est constitué, à côté des corporations, des syndicats ouvriers. Il y a des groupes d’ouvriers catholiques spéciaux aux métiers de la petite industrie. Ce sont les Gesellenvereine, fondés par Kolping, et les Arbeitervereine. Il y a aussi des Vereine protestans. Il y a des groupes libéraux établis sur le principe des trade-unions anglaises, sous la direction du parti progressiste allemand : ce sont les Gewerkvereine. Enfin, les groupes socialistes forment des unions qui portent le nom de Gewerkschaften et de Fachgenossenschaften. Toute cette organisation est encore à l’état rudimentaire et le temps seul pourra donner à l’ensemble l’homogénéité et l’unité nécessaires. Le législateur et les patrons ont à lutter contre l’influence du socialisme, qui est hostile au groupement professionnel et ne voit dans les associations que des machines de guerre contre la société.

Les Allemands ne sont pas encore d’accord sur les résultats moraux et politiques obtenus. Mais rien n’est plus instructif que l’étude de cette législation et des réformes qui sont projetées. La question posée n’est pas seulement sociale, elle est économique et politique ; on ne demande pas seulement à la corporation de rétablir la paix entre patrons et ouvriers, on lui demande de conserver contre la concurrence du dehors et la concurrence du dedans la petite industrie, qui semble condamnée à disparaître tôt ou tard. La discussion soutenue au Reichstag et à l’assemblée de Cologne par le docteur Karl Bûcher, professeur à Leipzig, le docteur Hitze, député, professeur à Munster, et le docteur von