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développement de vitesse qui ne serait pas bien prodigieux, les 3 000 kilomètres environ de Philippe ville ou Alger à la région du Tchad puissent être franchis au train de 40 kilomètres à l’heure en moyenne : il ne faudrait que 75 heures pour cette partie du parcours, plus quarante heures de Paris à Philippeville ou à Alger, en tout cent quinze heures ; les tropiques seraient ainsi à moins de cinq jours de Paris. à cinq jours de Bruxelles, et à cinq jours trois ou quatre heures de Londres.

Nous attirons l’attention sur ce point : les prétendus sages, personnes en général très superficielles et observateurs légers, se demandent parfois ce que pourrait produire un chemin de fer transsaharien. Il est facile de répondre à ces sceptiques impuissans qui incarnent l’esprit de négation : il ne se trouve pas, sur l’ensemble du globe, une situation semblable, où l’on puisse mettre une des parties les plus riches des tropiques, le Soudan central, à cinq ou six jours de distance des contrées les plus riches et les plus peuplées de la zone tempérée et des plus grandes capitales du monde. Croire que, dans ces conditions, une voie ferrée ne serait pas productive, qu’elle n’aurait pas, sinon du jour au lendemain, du moins au bout de peu d’années, un courant abondant non seulement de marchandises, mais surtout de voyageurs, cela n’est possible qu’à des hommes dont le cerveau est absolument fermé à la conception des conditions générales de productivité des travaux publics.

Un des plus pénétrans observateurs des phénomènes économiques et sociaux qu’ait produits la science allemande, Roscher, a fait remarquer que, toutes circonstances égales, une ligne ferrée qui suit le méridien est dans de meilleures conditions de rendement qu’une ligne ferrée qui suit le parallèle, parce que la première réunit des climats différens et des productions différentes ; elle dessert donc des besoins intenses d’échanges et de relations.

Sans entrer dans des calculs détaillés (nous en ferons cependant quelques-uns plus loin), il suffit de cette brève formule, que le chemin de fer transsaharien mettrait une partie très peuplée et très riche des tropiques à cinq ou six jours de Paris, Bruxelles et Londres, pour emporter la conviction d’une productivité certaine, et notamment d’un important trafic de voyageurs de toute catégorie, commerçans, fonctionnaires et employés divers, curieux et oisifs. Pour atteindre les tropiques par l’Egypte, il faut deux fois