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Non moins que le cheval, le cavalier s’est perfectionné par les courses ; sa main est meilleure ; les jeunes gens d’aujourd’hui montent beaucoup mieux que leurs grands-pères ; — profit appréciable, surtout pour les officiers de cavalerie. Conserver son sang-froid dans la vitesse est, chez un colonel courant à plein galop avec 500 hommes derrière lui, une qualité indispensable, puisque le choix de son point de direction et la moindre déviation dans sa ligne peuvent rendre efficace ou vaine la charge qu’il commande. Cette appréciation, cette conscience du train, si précieuse aux jockeys, comme je l’ai dit dans un précédent article[1], ne l’est pas moins aux conducteurs d’automobiles, aux bicyclistes professionnels, aux mécaniciens de locomotives.

Les officiers, partisans des courses militaires, dont l’émulation est à leurs yeux des plus heureuses pour l’arme à laquelle ils appartiennent, font observer que ces épreuves sont trop rares en France, qu’il n’en existe que trois par an à Auteuil, tandis qu’à Berlin, sur l’hippodrome de Carlshorst, il s’en trouve 42, dont le parcours est très sévère. Ils se plaignent aussi que, par les conditions qui leur sont faites, notamment par l’exclusion des prix en argent, ce sport utile demeure très onéreux, inaccessible même à ceux qui ne jouissent pas d’une large aisance. Il est certain que l’objet d’art, offert en prix, retourne presque chaque fois chez le marchand, lequel le reprend sous déduction de 10 pour 100 de sa valeur, pour le revendre à l’occasion prochaine.

La Société des steeple-chases est elle-même si convaincue de l’utilité des prix en espèces, qu’elle avait proposé d’en créer un de 20 000 francs pour les courses militaires. Le ministère de la Guerre ne l’a pas permis ; et ce point d’honneur semblera quelque peu suranné, en un temps où les récompenses académiques, décernées aux savans, ne perdent rien de leur dignité pour être jointes à l’octroi de quelques pièces d’or. En ce qui concerne le nombre restreint des courses d’officiers, à Auteuil, il tient à l’appréhension qu’éprouve le comité pour les accidens qui ne manqueraient pas de survenir. Là, plus qu’ailleurs, le cadre mondain surexcite l’amour-propre des champions, pousse aux imprudences ; et tous les chevaux n’auraient pas la préparation voulue.

Tels sont les argumens en présence, sur lesquels mon incompétence m’interdit de conclure. J’en dirai autant de la querelle

  1. Voyez la Revue du 1er août.