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Ce programme est-il bien différent de celui des ordres religieux catholiques, que le protestantisme a si longtemps proscrits et raillés, avant de les copier par la création des diaconesses. On voit que Mme Marholm s’avance pour son compte aussi loin que possible dans la réhabilitation de ces instituts admirables.

Si nous pénétrons enfin jusqu’au cœur de ses doctrines réactionnaires, si nous recherchons sa conception de la destinée de la femme et de l’existence normale qui convient à son sexe, nous constaterons sans peine que son remède favori, sa panacée bienfaisante, le thème sans cesse repris avec amour de sa prédication réformatrice, c’est le retour aux suggestions de la nature, c’est l’obéissance à la voix de l’instinct.

Parcourons les pages étincelantes dans lesquelles sont résumées ses thèses favorites. La femme ne peut jamais, en aucune circonstance, créer un point de départ. Tout ce qu’elle fait, accomplit, ou occasionne, n’est jamais qu’un dérivé, une conséquence, un développement de quelque chose d’antérieurement créé, présent ou donné. Et, quoi qu’elle en pense, dans le domaine de l’esprit, elle se voit soumise aux mêmes lois que dans sa constitution physiologique. Qu’elle accepte ou non de se soumettre aux règles physiques qui sont les siennes, qu’elle devienne mère, ou journaliste, elle ne saurait rien changer au code qui régit son intelligence comme son corps ; elle ne sera jamais une créatrice. Elle possède en revanche une qualité spécifique. Ce qu’elle reçoit de l’homme peut se développer en elle, beau ou laid, fort ou faible, sensé ou stupide, bon ou mauvais, subissant jusqu’à un certain point l’influence de sa propre substance, de ce qu’elle fournit d’elle-même à l’œuvre qui s’accomplit par elle. Mais, dans aucun cas, la femme la mieux douée n’est capable de changer une pensée fausse en une idée juste, un germe mauvais en un fruit savoureux.

Admirable franchise, n’est-il pas vrai, que cet aveu, dans la bouche d’une femme supérieure, des limites marquées par la nature à l’activité de la femme ? Or, poursuit Mme Marholm, l’émancipation de la femme est une de ces pensées fausses, issues de cerveaux masculins insuffisans, surmenés, débiles. L’homme cherchant un appui devenu nécessaire à sa faiblesse, dans une société minée par le temps, s’adresse à la femme et lui tient le discours suivant :

« Je ne puis te soutenir, te nourrir, te défendre, et je ne veux