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son cottage confortable, entre ses babys folâtrant sur des fauteuils de peluche, sa fille aînée jouant des valses au piano et sa jeune femme, à silhouette de keepsake, qui ne met presque jamais les pieds aux courses ; dans son bureau méthodique, garni de cartons soigneusement étiquetés, Lane ressemble plutôt à un rentier quelconque, touchant à la local gentry, qu’à une de ces faces dures et mortes de vieil enfant desséché, que coiffent sur la piste les toques de satin multicolores.

La figure indéfinissable, en parchemin rissolé, particulière aux jockeys, provient-elle des alternances du vent brutal, qui leur coupe le visage, avec les bains de vapeur qui le font bouillir ? Il est certain que le régime doit être pour quelque chose dans cet extérieur. L’obligation de ne pas excéder un poids donné interdit à peu près la profession aux individus de haute taille ; le plus grand de la corporation, W. Prat, avec 1m, 65, est regardé comme exceptionnel.

Aux charges légères — 40 à 50 kilos — les lads sont presque seuls capables d’être employés. Celles que l’on appelle «lourdes» — 50 à 56 kilos — exigent déjà des hommes passablement minces. D’autant plus que la selle et les étriers — un kilo et demi environ — comptent dans le calcul ; ainsi que la martingale, dont le supplément est insignifiant du reste et que plusieurs jockeys considèrent, quand elle est bien réglée, comme d’une aide considérable, en leur donnant un point d’appui pour diriger le cheval sans déranger son allure ; chose capitale, parce qu’une fois l’animal « dans son action, » il ne doit être troublé par quoi que ce soit. La cravache, pour prévenir les fraudes, n’est pas admise dans la balance ; il serait trop tentant de se peser avec une cravache à pomme de plomb et d’en prendre une autre pour courir.

Comme vêtement, l’indispensable : une casaque de quelques grammes, des bas et une chemise de soie, une culotte de toile et des bottes très fines. Le « valet des jockeys, » chef de leur vestiaire, est présent, avec ses garçons, au pesage de tous les hippodromes ; il entretient et transporte pour ses cliens les costumes qui leur appartiennent, dont il les aide à se revêtir. De sorte que le jockey, allant aux courses sans savoir s’il montera, a toujours sous la main de quoi s’équiper.

Si toutefois il est suffisamment délesté pour remplir les conditions du programme : cette légèreté inexorable est la préoccupation