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à partir des premiers villages de l’Aïr et sur un parcours de 630 à 700 kilomètres, on les aurait à bien meilleur compte.

L’exploitation pourrait être très économique : certaines de nos compagnies africaines, celle de Bône-Guelma notamment, ont beaucoup amélioré leurs méthodes à ce sujet. En 1897, les 232 kilomètres à voie étroite exploités en Tunisie par cette compagnie, avec deux trains par jour au minimum dans chaque sens, n’ont pas coûté en moyenne tout à fait 2 000 francs de frais d’exploitation par kilomètre et ont laissé une recette nette de 90 000 francs, quoique ces lignes soient toutes nouvelles et parcourent en général des pays assez incultes et très peu peuplés. Les frais d’exploitation du chemin de fer transsaharien pourraient être très peu élevés, surtout si l’Etat dégrevait le pétrole avec lequel on pourrait chauffer les locomotives. Il y a deux hypothèses pour le Transsaharien : ou il aurait un grand trafic et une exploitation intensive, ce qui n’est nullement improbable, à la longue du moins ; il faudrait alors plusieurs trains chaque jour dans chaque sens, et peut-être des trains de voyageurs distincts des trains de marchandises ; ou bien le trafic sera restreint ; nous regardons la première hypothèse comme plus probable avec le temps ; mais tenons-nous-en à la seconde, qui est la plus désavantageuse pour notre thèse. Dans ce cas d’un trafic réduit, il suffirait d’avoir en chaque sens deux ou trois trains par semaine ; le Transcaspien a actuellement trois trains hebdomadaires. Dans ces conditions, les frais d’exploitation ne devraient pas dépasser 2 000 francs par kilomètre ; car il y aurait quatre à cinq fois moins de trains que sur les lignes tunisiennes nouvelles de la Compagnie Bône-Guelma qui n’arrivent pas tout à fait à cette dépense kilométrique ; certaines dépenses seraient plus grandes dans le désert, mais d’un autre côté, le bien moindre nombre de trains fournirait une compensation aux économies. Il nous paraît incontestable, et nous allons essayer de le démontrer, que ces 2 000 francs de frais d’exploitation par kilomètre seraient très facilement couverts, et bientôt largement dépassés.


IV

Quel pourrait être le trafic du chemin de fer transsaharien ? Il est clair qu’on ne peut l’évaluer avec exactitude, parce qu’il est presque tout entier à créer. Un esprit habitué à l’observation