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sens. Bien que la profondeur des cases ne soit, ainsi qu’il vient d’être dit, que d’un mètre, on a pu en extraire une racine d’une longueur de 1 m, 75. Les parties jeunes des racines, celles qui sont chargées de poils absorbans, ne trouvent pas d’eau dans les cailloux qui garnissent le fond, et comme la partie supérieure de la racine ne peut profiter de l’humidité de la bonne terre qu’elle traverse, puisque les poils absorbans font défaut, la tige aérienne du blé est mal abreuvée, elle jaunit rapidement dès le mois de juin, se dessèche, et la récolte est faible.

Dans les champs, les racines traversent la bonne terre, comme elles le font dans les cases, mais elles ne rencontrent pas d’obstacles à leur élongation, elles s’enfoncent dans le sous-sol, profitant pour passer de tous les trous forés par les insectes, et, si les réserves sont abondantes dans ces profondeurs, la récolte est bonne.

Je connais dans la Limagne d’Auvergne une pièce dont les rendemens en blé sont presque toujours excellens ; j’y ai fait exécuter des fouilles ; à 1 m, 50 environ, on trouve une couche absolument mouillée ; elle alimente une population de roseaux, dont les tiges vertes se mêlent en juillet aux épis dorés de la moisson. Les plus belles récoltes de blé que nous ayons faites dans le Nord et le Pas-de-Calais, feu M. Porion et moi, nous ont été données par une pièce reposant sur une couche d’argile, tellement imperméable qu’il avait fallu drainer. Dans cette argile, l’eau ne faisait jamais défaut, et l’on a recueilli, sur cette terre forte, jusqu’à 48 quintaux de grain par hectare. Ces terres fortes, à sous-sol argileux, sont essentiellement des terres à blé, mais elles n’acquièrent toute leur valeur qu’autant qu’elles ont été assez bien ameublies pour constituer dans leur sous-sol de puissantes réserves d’humidité.

Quand on fait creuser une tranchée dans un champ de betteraves, de façon à voir la disposition des racines, on reconnaît qu’elles ne s’enfoncent pas dans les profondeurs comme celles du blé, elles ne dépassent guère 50 ou 60 centimètres, elles profitent surtout de l’eau que renferme la couche ameublie ; aussi, pour obtenir de bonnes récoltes de racines, y a-t-il avantage à augmenter l’épaisseur de cette couche par des labours profonds. Pour cette culture cependant, comme pour celle du blé, les réserves du sous-sol exercent dans certains cas une action décisive. Pendant les années humides, les betteraves des cases sont aussi belles que celles de pleine terre, les rendemens s’équilibrent ;