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Pour que de tout temps on ait reconnu que la fécondité du sol est étroitement liée à son ameublissement, il faut que la plante trouve dans une terre bien travaillée les conditions favorables à son développement, et que celles-ci fassent défaut, au moins partiellement, dans un sol durci par la sécheresse, ou tassé par la pluie. Or, une plante ne se développe normalement que si elle envoie ses racines dans un milieu aéré, humide et si elle y trouve en quantité suffisante ses alimens : nitrates, phosphates, sels de chaux et de potasse. Nous sommes donc conduits, pour comprendre les effets heureux du travail du sol, à comparer l’aération, l’approvisionnement d’eau, les transformations que subissent les substances propres à l’alimentation végétale, dans une terre meuble et dans une terre tassée.

À quelque état qu’elle se trouve, la terre est toujours très poreuse ; les petites particules solides qui la composent sont loin de s’encastrer complètement les unes dans les autres ; elles laissent au contraire, entre elles, de nombreux espaces vides dans lesquels se logent de l’air et de l’eau. On le reconnaît aisément en comparant le poids spécifique d’une terre à sa densité. Quand on remplit d’une terre en poudre un vase d’un litre, qu’on l’y tasse par des secousses répétées, on constate un poids de 1 300 à 1 400 grammes, tandis que si, par une des méthodes usitées en physique, on détermine sa densité, on arrive à 2,5 ou 2,6. Cette énorme différence indique clairement qu’une terre qui paraît tassée est bien loin cependant de former une masse continue. Ses particules laissent entre elles des vides, dont on peut mesurer grossièrement l’étendue en versant doucement, dans le litre de terre tassée, de l’eau contenue dans un vase gradué, jusqu’au moment où elle forme une très légère couche à la surface. On réussit d’ordinaire à faire pénétrer dans la terre de 300 à 400 centimètres cubes d’eau, qui se logent dans les interstices, en chassant l’air qui les occupait.

Ce sont là des expériences de laboratoire qui ne donnent pas une idée précise de l’état d’aération d’une terre en place, bien travaillée et d’une autre terre abandonnée à la végétation spontanée. J’ai procédé à cette détermination à l’aide de cadres, boîtes carrées sans fond, en tôle, dont les parois verticales sont rebroussées à angle droit à la partie supérieure. Les côtés horizontaux des deux cadres que j’ai employés avaient 20 centimètres, mais la hauteur de l’un était de 15 centimètres, celle de l’autre de 20 ; ces cadres présentaient donc une capacité de 6 et de 8 litres. On conçoit aisément