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les graines tombent dans les trous, se répartissent inégalement, et la levée est irrégulière. En outre, dans les mottes gisantes sur le champ, ou incomplètement reliées au reste de la terre, l’aération et l’infiltration de l’eau se font mal. Si la pluie survient, elles restent gorgées d’eau et ne contiennent plus d’air ; si, au contraire, le temps est sec, elles perdent toute l’eau qu’elles renfermaient. Je les ai soumises à une étude spéciale et j’y ai toujours trouvé des proportions d’eau et d’air, plus faibles que dans les terres continues. Il est naturel qu’il en soit ainsi. Les particules de terre ne restent agrégées en mottes que lorsqu’elles sont soudées les unes aux autres ; ce qui implique que les vides, dans lesquels se logent l’air et l’eau, soient restreints.

Le travail des herses et des rouleaux brise-mottes est donc tout aussi nécessaire que celui de la charrue elle-même ; au printemps, son intervention devient parfois dangereuse, car elle peut provoquer, dans un sol encore mal ressuyé des pluies d’hiver, une nouvelle formation de mottes, très difficiles à réduire, puisqu’on ne peut plus compter sur l’action efficace de la gelée.

Il faut avoir été soi-même victime d’un travail entrepris mal à propos, avoir eu à gémir sur une terre gâtée, pour comprendre quelle connaissance approfondie un bon praticien doit avoir de sa terre, afin de la prendre à temps et de savoir quelle façon il convient de lui donner. Dire d’un cultivateur qu’il connaît bien sa terre est un des plus grands éloges qu’on puisse faire de son habileté.

Au lieu d’utiliser la force des animaux, la petite culture ne met en œuvre que les bras de l’homme ; ils servent même parfois aux défrichemens et j’ai vu en Algérie de longues bandes de Marocains ouvrir, à grands coups de pioche, les terres incultes sur lesquelles on voulait planter la vigne. Le jardinier, le maraîcher, qui tiennent des terres depuis longtemps en culture, se bornent à les bêcher, et ce travail, habilement exécuté, ameublit le sol bien plus complètement que ne le peuvent faire les instrumens attelés, mis en œuvre sur de grandes surfaces.


II. — LES EFFETS DE L’AMEUBLISSEMENT

À l’aide des charrues, des herses, des rouleaux, on a pulvérisé la terre ; elle est bien ameublie. Quelles propriétés nouvelles a-t-elle acquises qui légitiment le pénible travail auquel nous nous sommes appliqués ? C’est là ce qu’il s’agit de préciser.