Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 151.djvu/701

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ta coiffure étoilée, ô petit front royal,
Ornera lumineusement le soir austral ;
Et tu verras aussi ta grande chevelure
Eblouir le silence où dort la nuit obscure ;
Et de ta tresse éparse en un long flamboiement
L’astre déchevelé poindre au noir firmament.


THALLO


Lorsque vous m’étendrez au bûcher de santal,
Avant que je devienne une cendre légère,
Eloignez de mes doigts l’obole de métal.

Je veux que ce qui fut ma grâce passagère
Charme encor d’un baiser le passeur infernal
Quand vous de ces baisers n’aurez que la poussière.

Puisque l’ennui de vivre et l’effroi, tour à tour,
De la mort, ont toujours tourmenté mes pensées
Et que triste et divin fut mon terrestre amour.

Que je rentre à jamais dans les choses passées
Et que de ma beauté l’on parle quelque jour
Quand je serai lointaine aux mémoires lassées.

Mon âme, fleur funèbre, ô Nuit, t’embaumera ;
Papillon ténébreux que le sort fit diurne,
Son aile d’ombre errante en l’ombre se perdra.

Et moi qui fus si grande, une très petite urne
D’argile ou de cristal transparent, contiendra
Ma chair voluptueuse et mon cœur taciturne.