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On pratiqua donc des trous dans la coquille, au moyen du trépan, et par ces orifices qui, après l’opération, furent fermés avec un ciment approprié, on introduisit entre le test et le manteau des perles de nacre. D’autres, au moyen d’un crin de Florence, furent amenées directement dans la cavité branchiale. Après trois ou quatre mois, les premières perles étaient recouvertes d’une couche mince de nacre qui leur donnait l’apparence de véritables perles fines. Le résultat était très remarquable.

On peut douter que ces perles de Roscoff puissent jamais faire une concurrence sérieuse aux perles de Bahréin, de Ceylan ou de Panama. Mais peut-être n’est-ce point là non plus le seul but que s’est proposé l’auteur. Il a voulu éclairer une question scientifique : et il me paraît que, sur un point tout au moins, il y est parvenu.

Il s’agit de la structure de la coquille. On sait que la coquille du mollusque est, à son plus haut degré de développement, composée de trois couches. La plus extérieure est la cuticule, sorte de membrane cornée extrêmement mince composée de conchyoline : au-dessous se trouve une assise d’émail, mosaïque de prismes perpendiculairement implantés. Ces deux couches représentent ce que l’on appelle le revêtement externe, l’épiderme cochléaire ou le « périostracon. » Au-dessous se trouve la série indéfinie des feuillets de nacre disposés en strates parallèles.

La couche de nacre, on n’en a jamais douté, est le produit de l’activité du manteau. Elle est duc au délitement des cellules en palissade du manteau, et non à une sécrétion de glande, ainsi qu’on le dit improprement. C’est par son continuel dépôt que la coquille s’accroît en épaisseur. Quant au périostracon qui s’étend comme une couverte de porcelaine sur la nacre, on enseigne, dans tous les traités classiques, qu’il a été produit non par le manteau lui-même dans toute son étendue, mais seulement par l’ourlet marginal qui dépose des zones concentriques toujours grandissantes de périostracon : le reste du manteau ne ferait que doubler ensuite cette sorte de voûte, d’une couche de nacre. Telle est la théorie admise. M. L. Boutan la prétend inexacte. L’ourlet palléal et le reste du manteau ne procèdent pas différemment ; ils ne se divisent pas le travail de la formation de la coquille. Chaque partie fait la même besogne, c’est-à-dire à la fois la nacre, l’émail et la cuticule ; elle produit une même sécrétion qui, au contact du milieu extérieur, évolue en périostracon,