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À Hohenlinden, où il parvint avec quelques hommes à franchir un régiment ennemi qui l’avait enveloppé par surprise ; à Schwanstadt, où il eut la bonne fortune de faire prisonnier un général autrichien, et d’ailleurs, durant tout le cours de cette glorieuse campagne, Reiset donna tant de preuves d’habileté et de courage qu’aussitôt après la paix de Lunéville Moreau lui offrit le choix entre un sabre d’honneur et la nomination au grade de chef d’escadrons. Le jeune homme se décida pour le second parti : nommé le 15 juin 1801, il fut envoyé le 4 février suivant à Soissons, pour y tenir garnison. C’est là que nous allons le retrouver tout à l’heure : mais peut-être nous saura-t-on gré d’extraire encore d’une lettre écrite de Paris en 1801 ces quelques détails sur le mémorable voyage en France du roi et de la reine d’Etrurie :

« Le prince de Toscane don Luis Ier, que le Premier Consul vient de faire roi d’Étrurie, est venu le visiter avant de se rendre dans son royaume. Il semble ne pas briller par l’intelligence et l’on s’est un peu égayé à ses dépens. Son air emprunté ne prévient pas en sa faveur ; et son économie, poussée à l’extrême dans les plus petites choses, prête souvent à rire dans son entourage. Pourtant le Premier Consul n’aurait pas permis que tout cela allât trop loin : aussi les critiques se sont faites tout bas, et il a reçu, malgré tout, un accueil dont il a lieu d’être satisfait. Mme de Montesson a donné en l’honneur de Leurs Majestés un bal des plus hrillans. Une fête du même genre a eu lieu chez M. Chaptal, le ministre de l’Intérieur, et les deux réunions ont rivalisé de magnificence. Le prince a désiré assister à une séance de l’Institut, quoique ses aptitudes personnelles ne semblent pas beaucoup justifier cette idée. C’est le même M. Chaptal qui les y a reçus ; mais ni le roi ni la reine n’ont semblé prendre grand plaisir à tous les beaux discours qu’on a prononcés en leur présence et auxquels ils n’ont point paru comprendre grand’chose. »

III

Nous nous sommes promis de retrouver Reiset à Soissons, où il arriva en février 1802, et tint garnison un peu plus de trois ans. Mais en vérité la partie la plus intéressante de ses lettres et notes de cette période n’est point celle qui se rapporte à son séjour dans la petite ville picarde. Il menait à Soissons une vie très tranquille