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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 décembre.


Une année de plus s’achève. Chacune, en s’en allant, laisse derrière elle quelque chose dont le présent continue de vivre, et où l’avenir trouve parfois des germes à développer ; mais il y en a de fécondes et il y en a de stériles. Nous craignons bien qu’il ne faille classer 1898 dans cette seconde catégorie. Et cependant l’année écoulée appartenait, à sa naissance, au nombre de celles dont il était permis d’attendre quelque chose. La Chambre des députés devait y être renouvelée en son entier, et la consultation électorale se faisait, au mois de mai dernier, dans des conditions qui semblaient favorables. Un ministère occupait le pouvoir depuis près de deux ans déjà, chose rare dans nos mœurs parlementaires. Il avait eu au Palais-Bourbon une majorité toujours croissante, inébranlable et fidèle. Le problème avec lequel nous avons été aux prises dans ces dernières années était de faire une majorité : on pouvait le croire résolu, et il l’aurait été effectivement, si le pays avait confirmé la solution que la Chambre lui avait donnée. Malheureusement, les choses ne se sont point passées ainsi. L’ancienne majorité, qui aurait dû revenir augmentée, est revenue amoindrie, et, dès lors, un peu découragée. Sa confiance avait diminué. Elle n’avait d’ailleurs pas été remplacée par une autre : elle était ébranlée, mais subsistante. Les radicaux et les socialistes, même en confondant leurs forces plus intimement que par le passé, n’étaient pas les plus nombreux ; en revanche, ils étaient les plus audacieux, les plus entreprenans, les plus hardis, et l’assurance qu’ils montraient était en quelque sorte en proportion de celle qu’avaient perdue les modérés ou les progressistes. Telle était la situation au lendemain de l’épreuve électorale. Les modérés ont commis une lourde faute en ne soutenant pas le ministère Méline, et en ne livrant pas bataille avec lui et pour lui ; mais cette faute était presque inévitable, étant donné le désarroi général. Aussi le ministère s’est-il senti atteint avant même que la Chambre fût réunie, et a-t-il survécu quelques