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à cette convention, le bateau, en revenant à son point de départ y retrouvera la date qu’il apporte lui-même.

L’heure universelle supprimerait encore d’autres singularités, qui se rattachent aux mêmes causes. Imaginons un télégramme parti de Paris le lundi 1er août à minuit une minute, passant par Saint-Pétersbourg, Tobolsk, Pékin, New York, pour revenir à Paris, et supposons que sa transmission n’exige aucun temps appréciable. L’employé de Saint-Pétersbourg aura noté son passage le lundi 1er août à 2 heures du matin ; celui de Pékin à 8 heures ; de Tokio à 9 heures ; de San-Francisco à 3 heures de l’après-midi ; celui de New York l’aura daté, lundi 1er août 7 heures du soir ; il sera 11 heures et demie quand il passera à Valentia (Irlande), et minuit quand il sera à Paris. Il aura fait le tour du monde en un éclair de temps et il arrivera cependant postdaté de 24 heures 5 mardi 2 août, minuit une minute), selon les indications de transmission. Au contraire, si le télégramme instantané avait circulé en sens inverse, il arriverait antidaté de 24 heures, c’est-à-dire du dimanche 31 juillet à minuit ; c’est une différence de 48 heures. Il faudrait une convention analogue à celle du « saut du jour » dont nous venons de parler, pour faire disparaître ces difficultés, à moins d’adopter l’heure universelle.

Une autre simplification réelle, mais qui heurterait les habitudes et le langage et par suite serait regardée comme une insupportable complication, est relative au changement de date. Ce changement est attaché maintenant, — après avoir beaucoup varié, — à l’heure de minuit ; c’est elle qui sépare la « veille » du « lendemain ; » c’est elle qui donne le signal du remplacement du quantième et du jour de la semaine. Dans le système de l’heure locale, le saut de date s’opère à des momens différens suivant les lieux. Il est déjà accompli dans une localité alors qu’il ne l’est pas encore dans une autre située à l’ouest de la première. On notait mardi 2 août à Paris, au même instant où l’on datait encore lundi 1er août à Brest. Un phénomène météorologique, apparition de bolide, etc., qui se montrerait au même instant physique en des lieux divers y serait rapporté, par conséquent, à des dates différentes. Il faut, pour se rendre compte de l’extension d’un phénomène de ce genre, dépouiller les observations locales et les traduire en quelque sorte dans le langage de l’heure universelle. De même, si l’on veut suivre la marche d’un cyclone ou d’un tremblement de terre. Avec l’heure