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FRÉDÉGONDE, inquiète.

Il s’arrête !… il hésite… il se retourne !

PRÉTEXTAT.

Il pleure !

FRÉDÉGONDE.

Non ! il ne pleure pas : il s’en va !

PRÉTEXTAT.

Que je meure ! Mais toi, laisseras-tu ce forfait s’accomplir ?
Non ! va ! cours ! — ou vers lui permets-moi de courir !
Oh ! lève ce secret sous lequel je succombe !
Je suis comme un vivant enfermé dans la tombe !…
Et puis, tu t’es trompée, ô reine, si tu crois…
Lui. Lother ! lui, frapper l’héritier de nos rois ?
Ah ! si tu connaissais son cœur comme moi-même !
Si tu savais…

FRÉDÉGONDE.

Je sais qu’il s’éloigne, et qu’il m’aime !

PRÉTEXTAT.

T’aimer ?… l’on peut t’aimer, toi ?… Ne m’écoute pas :
La douleur… Dieu puissant ! je n’entends plus ses pas !
— Ah ! sur tes deux enfans !… O femme, ô reine, ô mère,
Sur tes enfans, pitié pour l’enfant d’Audovère !

FRÉDÉGONDE, prêtant l’oreille.

Écoute, Prétextat !…

PRÉTEXTAT.

Le galop d’un cheval !

FRÉDÉGONDE, triomphante.

Mérovée est à moi !

PRÉTEXTAT, terrible.

Mais toi, monstre infernal,
Tu m’appartiens !

FRÉDÉGONDE.

A moi.

PRÉTEXTAT, lui barrant la sortie.

Vains appels ! larmes vaines !
Le vieux sang des Gaulois bouillonne dans mes veines !