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nouvelle qui va relier directement Arles à Nîmes. Le progrès est lent, mais continu. Comment pourrait-il être plus rapide, dans un pays auquel les capitaux font défaut aussi bien que les bras, parce qu’il est exclusivement agricole et qu’il manque de population ? La Camargue ne compte qu’un habitant pour vingt hectares : cela suffit à expliquer sa situation agricole.

Pour compléter cet aperçu de l’agriculture du delta du Rhône, il ne me reste qu’à passer rapidement en revue ses produits actuels. Le produit des étangs se limite à la pêche et à la chasse : il est à peu près nul. Les marais sont beaucoup plus productifs : ils fournissent des roseaux et des litières qui se vendent bien ; les plus grossiers nourrissent des taureaux et des chevaux camargues. Les taureaux se louent pour les courses, fort en vogue dans la région, et procurent des profits assez importans à leurs propriétaires. Les chevaux étaient employés autrefois au dépiquage, mais les batteuses à vapeur les ont remplacés dans cette fonction. Leur élevage donne fort peu de bénéfices : aussi tendent-ils à disparaître. Depuis trente ans, leur effectif est tombé de 4 000 à 1 500 têtes. Les bœufs de Camargue sont encore au nombre de 4 500 environ ; au siècle dernier, on n’en comptait pas moins de 16 000. La partie du delta comprise dans la commune d’Arles nourrit 250 000 bêtes à laine. Malgré la dépréciation des laines, cet élevage est encore l’une des branches les plus prospères de l’agriculture du pays.

La culture la plus répandue dans les terres arables est celle des céréales. On récolte annuellement, dans les plaines du bas Rhône, environ 200 000 hectolitres de blé et 80 000 hectolitres d’orge et d’avoine. L’assolement est biennal. Mais on tend à faire porter la terre tous les ans, en variant les cultures et en employant les engrais chimiques. Les fourrages artificiels, luzerne, trèfle, sainfoin, etc., viennent après les céréales, dans l’ordre d’importance des cultures. Ils donnent de nombreuses coupes et de très bonnes récoltes, surtout lorsqu’ils sont arrosés en été. Je cite pour mémoire la culture du riz, dont le principal objet est de dessaler la terre, mais qui donne en même temps de très beaux produits. Les terres du delta sont très fertiles et se prêtent aux cultures les plus riches. La garance, les chardons y donnaient de grands profits, lorsque les prix étaient rémunérateurs. La ramie y vient très bien, de même que le coton. La cherté de la main-d’œuvre est le seul obstacle qui s’oppose à cette dernière culture.

Dans ces dernières années, la culture de la vigne a pris une