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Ce braconnier a tiré parti d’un fait bien connu des charbonniers qui habitent la forêt d’Orléans. Les cerfs et les chevreuils, trouvant dans la forêt tout ce qui est nécessaire pour leur alimentation, n’en sortent presque jamais. Quand, pour une raison quelconque, ils s’aventurent dans le terrain avoisinant, ils suivent au retour le chemin pratiqué à l’aller.

L’art de mettre des collets est fondé sur cette observation. Le collet disposé sous bois, sur un point de passage présumé ou même au point précis où est passé un animal, ne le prend pas forcément. Celui-ci circule en effet dans toute l’étendue de son domaine, il délaisse souvent une piste pour en pratiquer de nouvelles ; tandis que l’animal qui s’est aventuré en terrain inconnu rentrera certainement sous peu et repassera au point par lequel il est sorti. Si son départ a été observé, il sera sûrement pris.

2° Le cheval passant chaque jour vingt-deux heures sur vingt-quatre à l’écurie, dans une demi-obscurité, le nez contre un mur, ne saurait être doué de beaucoup d’instinct. Toute activité spontanée lui est interdite, puisqu’il ne sort que pour obéir à son maître. L’instinct chez lui est par suite sinon atrophié, du moins sensiblement diminué.

L’écurie est un centre d’attraction permanent pour le cheval qui y trouve la nourriture et le repos. Mis en liberté, il s’oriente donc sur son écurie avec l’obstination de l’aiguille aimantée cherchant le pôle.

Le cheval connaît parfaitement les abords de sa résidence. Si, au cours d’une promenade, on lui laisse les rênes sur le cou, il en profite pour rentrer à l’écurie. Aidé par une excellente mémoire, il connaît la longueur comparative des différens chemins à suivre, et prend sans hésiter le plus court.

Supposons qu’on amene le même cheval dans une contrée qu’il ne connaît pas. Après un séjour de quelques heures dans une écurie quelconque, il reporte sur son nouveau domicile l’attachement qu’il avait pour l’ancien. Si, au cours de la première promenade, on s’en remet à son instinct pour le retour, on constate qu’il reprend en sens inverse le chemin suivi à l’aller, même si ce chemin n’est pas le plus court.

3° Le pigeon voyageur lâché dans un rayon restreint autour de sa demeure regagne le colombier par le chemin le plus court. Si on le met en liberté à plusieurs centaines de kilomètres de son colombier, il suit très sensiblement au retour la ligne de chemin