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DANS L’EST AMÉRICAIN

NEW-YORK. — BALTIMORE. — BRYN MAWR


I

New-York. 22 mars. — Au reporter un peu pressé qui me demandait ce matin, avant même que la douane eût achevé de visiter nos malles, comment je trouvais l’Amérique, j’ai répondu que je lui répondrais quand je l’aurais découverte ; et depuis deux ou trois heures, je la cherche consciencieusement dans les rues de New-York. Elle doit y être ; elle y est sûrement, et je l’y trouverai ; mais le fait est que je ne l’y vois point encore. Non, en vérité, ni ces maisons ne diffèrent de tant d’autres que j’ai vues, — où cela ? dans les quartiers neufs d’Anvers, ou de Cologne, peut-être ; — ni ces rues ne sont plus animées, d’une autre animation que nos rues de Paris ; ni ces visages n’ont rien de plus fiévreux ou seulement de plus tourmenté que les nôtres ; et, dans l’air léger, sous le soleil qui brille, j’ai peine à croire que j’aie changé de cieux.

Aussi bien ai-je les yeux et l’esprit ainsi faits que, partout où j’ai passé, j’ai vu les hommes plus semblables entre eux que leur vanité n’en veut bien convenir ; et, sans doute, c’est une fâcheuse disposition pour « observer, » mais qui sait si ce n’en est pas une bonne pour mieux voir ? que de voyageurs dont les récits n’ont éveillé chez moi qu’un grand étonnement de leur ingénuité ! Ils découvraient partout des différences, et ces différences n’en étaient point pour moi. Européens ou Américains, jaunes ou blancs,