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chemin de fer, c’est-à-dire pour ceux à faible trafic, la question ne saurait même être posée. Ainsi on peut dire que toutes les difficultés apparentes de la construction d’un canal maritime trouvent leur solution dans ce qui existe soit en France, soit à l’étranger. C’est donc avec une juste appréciation du côté technique de la création d’un canal maritime entre Paris et Rouen que le conseil général des Ponts et Chaussées a pu dire qu’il ne présentait pas de difficultés supérieures à celles que les ingénieurs rencontraient dans des travaux du même genre, et qu’un ministre des travaux publics a déclaré devant une commission de la Chambre des députés qu’il approuvait l’œuvre projetée de Paris port de mer.

Il semble donc que, puisque tout est possible, facile même dans une certaine mesure, que le commerce doit y gagner, que l’État n’ayant à payer ni garantie d’intérêts ni subvention, en retirera des avantages certains, il n’y a qu’une chose à faire : commencer tout de suite les travaux. Mais, si le public et le gouvernement bénéficient de l’ouverture de Paris à la navigation maritime, des particuliers croient qu’ils y perdront ; quelques situations seront modifiées ; des amours-propres se trouveront froissés, et c’est ainsi qu’une question aussi grosse de conséquences heureuses reste sans solution, après avoir obtenu du parlement six rapports favorables, et réuni dans la précédente législature près de trois cents signatures de députés.

On a critiqué la largeur, la profondeur du canal projeté, le nombre de ses écluses ; des ingénieurs ont déclaré que ses biefs, quelle que fût leur longueur, n’auraient pas de pente, quoique cela fût contraire aux lois de la pesanteur ; on a comparé à un jeu de bagues le fait d’un capitaine faisant enfiler à son navire trente travées de ponts mobiles, sans songer que cette opération se fait cent fois par jour sur la Seine pour les caboteurs et pour les chalands, et que la difficulté est d’autant plus grande, en ce qui regarde ces derniers, que leur manœuvre n’est pas indépendante et que leur distance du remorqueur peut être de 400 mètres.

Les quelques modifications apportées au plan des eaux de la Seine ont paru aux uns devoir entraîner le dessèchement de la Normandie, tandis que, pour d’autres, l’inondation de la vallée pourrait provenir des sources mises à jour par le dragage du lit de la Seine. On a parlé aussi de la stérilisation des îles, verdoyantes aujourd’hui, ainsi que du bord du fleuve, par le dépôt