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d’Orléans à Angers que 245 kilomètres, soit treize de plus seulement que la longueur du fleuve entre ces deux villes. Le canal, parti un peu en amont de Combleux (embouchure du canal d’Orléans) sur la rive gauche, arrive sur la Dhuis, atteint par elle le Loiret canalisé, le quitte pour le val de Cléry qui le mène à l’Ardoux ; à Saint-Laurent-des-Eaux, il se sépare de cette rivière et traverse la Loire, passe à droite par Mer et Suèvres ; là, nouvelle traversée : le canal débouche à Montlivault et emprunte la vallée du Cosson pour le quitter bientôt et, à Chouzy, revenir sur la rive droite, la suivre, grâce à la Cisse, jusqu’à Vouvray, et l’abandonner en ce point pour gagner, à gauche, le val de Tours, parallèlement au chemin de fer. Le canal actuel du Cher à la Loire amènerait le nouveau canal au grand affluent, qu’il suivrait sur sa gauche jusqu’à son ancien lit, emprunterait celui-ci jusqu’à la Loire pour traverser encore le fleuve. Sur la rive droite, il longerait la voie ferrée et l’Authion, en emprunterait partiellement le cours et, par deux branches, déboucherait dans la Maine sous Angers et à Bouchemaine. De la Maine à Nantes, le canal passerait de droite à gauche, puis en sens inverse, pour finir dans la gare d’eau du canal Félix à Nantes.

Tel est le projet : le canal saute huit fois d’une rive à l’autre. Mais ces traversées sont toujours dues aux coteaux. On n’a même pas souci de desservir les grandes villes à leur gré : Orléans et Blois ne communiqueraient avec le canal que par un embranchement : Saumur serait éloigné de lui de 5 kilomètres ; un embranchement, si l’on en faisait un, aurait à franchir un chemin de fer et la Loire, remarquablement large à cet endroit.

A chaque croisement, on ménagerait, dit-on, une communication avec le fleuve ; mais l’expérience a prouvé que ces communications, entre un fleuve mauvais et un canal, gênent la navigation sur la voie artificielle, sinon sur l’ancienne en même temps. Le canal latéral à la Loire traversait le fleuve à Châtillon ; on a dû le surélever et construire un pont-canal ; ç’a été une délivrance pour la batellerie qui renonçait presque à employer cette voie. S’il faut huit ponts-canaux, quelques-uns longs de deux kilomètres, quelle dépense[1] !

Quoi qu’il en soit, ce canal est déjà plus qu’un projet : il est voté. Les Français ne s’en doutent guère. Mais il est compris

  1. Celui de Châtillon a coûté 3 millions.