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comparaisons que font à ce sujet divers statisticiens entre la natalité des différens quartiers d’une ville, ou entre l’état des familles dans les quartiers riches et les quartiers moyens d’après les recensemens, sont insuffisamment probantes. La constitution démographique des divers quartiers n’est pas, en effet, la même. Il se trouve dans les quartiers riches une plus forte proportion de ménages âgés, de gens retraités, de domestiques et de personnes qui ne passent qu’une partie de l’année à la ville ; la natalité enregistrée doit donc y être plus faible, sans qu’on puisse rien en inférer. Nous croyons que, en France notamment, il y a plus d’enfans dans la tout à fait haute bourgeoisie et dans l’aristocratie que parmi les petits bourgeois, les paysans des départemens normands et des départemens riverains de la Garonne, et même que parmi les artisans, les contremaîtres et les ouvriers d’élite.

C’est une autre erreur d’attribuer soit aux charges d’impôts, notamment aux taxes indirectes, comme on le fait souvent, ou même au service militaire la faible natalité française. Les Belges jouissent du régime fiscal le plus léger qui soit au monde, ils ne connaissent pas le service militaire, personnel ; il en est de même au Massachusetts, au Connectent, dans Rhode Island ; cependant, la natalité est assez faible en Belgique et dans les États américains. Il importe, pour juger sainement des causes de la faiblesse de la natalité, de ne pas considérer un peuple en bloc, mais de prendre à part les différentes grandes divisions provinciales, ce qui permet de découvrir beaucoup mieux les influences diverses en jeu. Ainsi, en Belgique, il y a deux groupes distincts de population : les Flamands et les Wallons ; les premiers sont restés plus fidèles aux anciennes croyances et aux habitudes traditionnelles ; les seconds sont plus pénétrés de la nouvelle conception sociale et familiale démocratique. Or, dans les trois principales provinces flamandes, celles d’Anvers, la Flandre occidentale et la Flandre orientale, la natalité, sans être très forte et quoiqu’elle ait une tendance à diminuer, reste encore assez élevée : en 1892, elle allait de 31, 14 pour 1 000, à 33, 52, le minimum se rencontrant dans la Flandre orientale, et le maximum dans la province d’Anvers. Dans les provinces wallonnes, au contraire, la natalité est [1]

  1. Il est vrai qu’on y comprend les mort-nés, qui sont mis à part dans les statistiques des autres États ; mais la proportion des mort-nés à l’ensemble des naissances n’est que de 3 et demi à 4 p. 100 en Allemagne : 64 366 mort-nés, en 1895 sur 1 941 644 naissances.